Cemetery Boys, Aiden Thomas

« Strictement parlant, Yadriel ne s’introduisait pas dans une propriété privée puisqu’il avait vécu toute sa vie dans le cimetière. »

Parce que sa famille latinx a du mal à accepter son genre, Yadriel veut leur prouver à tous qu’il possède les pouvoirs d’invocation des hommes et non pas celui de guérir, comme les femmes. 


Voici un nouveau livre acheté lors de la fièvre dépensière du SLJP (mais si, vous vous souvenez, la petite blonde avec la moue contrite devant son sac anguleux tellement il était rempli de livres…) !

La couverture m’avait beaucoup attirée, j’ai lu la première ligne du résumé et je savais que j’allais l’acheter. Malgré ce que l’on pourrait croire, j’ai de vrais critères de sélections ! Il s’avère juste que Nawal sait exactement où m’emmener pour dépenser mes précieuses économies.

Retournons à nos moutons, ou plutôt à nos pierres tombales.

Comme le laisse aisément deviner le titre, cette histoire se déroule *roulement de tambours* dans un cimetière ! Et ça parle de garçons.

Allez zou, n’hésitez pas à revenir pour de nouvelles chroniques !

Trêve de plaisanteries, venons-en au cœur du sujet… Cimetery Boys suit les pérégrinations de Yadriel et de Maritza, suiveuse volontaire, ravie de se fourrer dans les histoires de son cousin. Ce dernier se bat pour faire entendre sa voix auprès de sa famille et de sa communauté : il n’est pas une bruja, mais un brujo, et il estime avoir tout autant le droit que les autres de perpétuer les traditions ancestrales des siens, de se présenter à la Santa Muerte, et d’accomplir la cérémonie qui lui permettra d’aider Leur Dame La Mort à guider les esprits égarés dans l’au-delà.

Seulement voilà, Yadriel est trans, et pour son père, chef des brujx du cimetière d’East LA, il ne pourra jamais être un vrai brujo. D’ailleurs, on lui refuse tout simplement de prendre part à la vie communautaire des adultes ; il est tout juste bon à faire ce qu’on demande aux enfants.

Alors Yadriel se rebelle, pour le plus grand plaisir de Maritza, sa cousine qui refuse de soigner avec du sang animal. Il l’aura sa cérémonie des quinces, dusse-t-il la faire avec Maritza pour seule témoin. Il l’aura sa dague bénie par Leur Dame La Mort, dusse-t-il la faire faire en secret par Maritza, fille du forgeron de leur communauté. Il aidera un esprit à passer tranquillement dans l’au-delà, dusse-t-il se taper un mec relou avec un sévère trouble de l’attention comme premier mort.

Mais la vie de Yadriel n’était pas assez compliquée comme elle l’était, manifestement, puisque Miguel, un autre de leur cousin, disparaît subitement lors d’une ronde au cimetière. Pire que ça, tous les brujx sentent sa mort… loin d’être paisible, bien au contraire.

Une course contre la montre s’engage alors : retrouver Miguel, aider cet esprit insupportable à traverser tranquillement, faire ses preuves à son père, à sa communauté, à lui-même, tout ça avant que minuit du 31 novembre sonne, annonçant le début du Día de Muertos.

Vous l’aurez compris, ce roman se déroule donc dans l’atmosphère colorée, chatoyante et mortuaire des quelques jours qui précèdent l’une des fêtes les plus connues des communautés Latinx : le Jour des Morts. L’auteur nous fait ici la fleur (d’Indes, vous le découvrirez !) de nous immerger dans sa culture, dans l’effervescence qui règne avant cette célébration si spéciale pour les personnages que nous suivons. Petits plats, grands plats, énormes casseroles, on goûte le temps de notre lecture à la cuisine de Lita, la grand-mère de Yadriel et cheffe spirituelle du cimetière, celle, vegan, de la mère de Maritza. Nous sommes invités à découvrir les rites, les pratiques et les joies de ces communautés multiculturelles, dans une narration toute en couleurs. C’est une véritable lettre d’amour à sa culture qu’a ici écrite Aiden Thomas, qui m’a rappelé la chaleur des fourneaux et des célébrations de la mienne. Les personnages sont bilingues, parfois avec de gros accents dans leur langue d’accueil. Ils en changent à loisir, mêlant joyeusement espagnol et anglais, tout en restant intelligible pour les non-hispanophones.

L’approche est d’autant plus émouvante qu’elle vient de Yadriel, pourtant mis à la marge de sa communauté par les siens parce qu’il ne rentre pas dans le moule millénaire des traditions. Et pourtant, il aime sa famille, sa communauté, ces us et coutumes.

Il désire réellement leur montrer qu’au-delà de la différence qu’ils n’arrivent pas à surmonter, il a pourtant toute sa place parmi eux.

Cette thématique est d’ailleurs récurrente dans le roman : le sentiment d’appartenance, d’être aimé, d’être compris par ceux qui constituent notre entourage, de pouvoir être nous-mêmes, sans conditions, sans compromis, juste nous et rien que nous est au cœur de l’histoire. C’est ici une véritable réinterprétation du roman d’apprentissage : ce n’est pas le personnage principal qui se découvre, qui évolue, ce sont ses proches qui le découvrent, le ou la lectrice qui se voit évoluer dans son univers.

J’ai beaucoup apprécié ce roman, entre le policier, le surnaturel, la romance et la déclaration d’amour à sa culture. Les personnages sont tous différents, attachants et, à mon sens, très justes. A cela s’ajoute que ce livre est un own voice, c’est-à-dire que l’auteur est lui-même un homme trans, comme son personnage principal. Il n’hésite pas non plus à s’attaquer à des sujets de sociétés, comme l’appropriation culturelle ou la xénophobie et les clichés qui font rages contre les minorités, ici vues sous le prisme de la communauté Latinx.

En résumé, c’est un roman de Noël idéal pour celles et ceux qui sont nostalgiques de l’ambiance d’Halloween !

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