Le Chant des cavalières, Jeanne Mariem Corrèze

Et maintenant ses restes traversaient le Royaume dans les flots de la Vouivre, avec les truites et les brochets pour seule compagnie. Elle se perdrait dans les replis des berges effondrées, s’échouerait contre des bancs de sable, s’emmêlerait au milieu des algues.

Dragons, cavalières et herboristes !

Un royaume divisé, instable, des forces luttant pour le pouvoir. Un Ordre de femmes chevauchant des dragons. Des matriarches, des cavalières, des écuyères et, parmi elles, Sophie, qui attend. Le premier sang, le premier vol ; son amante, son moment ; des réponses à ses questions. Pour trouver sa place, elle devra louvoyer entre les intrigues de la cour et de son Ordre, affronter ses peurs et ses doutes, choisir son propre destin, devenir qui elle est vraiment.


Avec Nawal, nous avons eu le plaisir de découvrir Jeanne Mariem Corrèze dans le collectif Diluées. Je suis immédiatement tombée amoureuse de sa plume si particulière, très poétique, toute en images, en métaphores, en personnifications. Le Chant des Cavalières a été rédigé avec cette même plume ; aussi, cela a été un véritable plaisir à lire. L’autrice manie les mots avec brio, et elle crée un récit riche, onirique et poétique, où chaque mot raisonne d’une manière particulière, transcende son usage quotidien. Ce Chant est digne des chansons des chevaliers d’antan, de la geste en prose du plus célèbre des Pendragon.

C’est un aspect que j’ai trouvé très appréciable et très intriguant, très intéressant aussi, la réécriture féminine de la légende d’Arthur. Et pourtant, il ne s’agit pas d’une simple réécriture ; l’autrice crée un univers complet, et brode sur les thématiques si typiques des romans de chevalerie, tout en réussissant à réaliser une tapisserie tout à fait originale.

L’héroïne est loin d’être parfaite, elle cache une grande colère, elle a peu de volonté en dehors de celle de se faire aimer des figures d’autorités ; elle est l’Elue, non pas pour ses qualités physiques, mais par coïncidences, par calculs politiques ; elle fait ce qu’on lui dit de faire, dans un semblant de choix, tout en se rendant bien compte que ce sont les autres qui décident pour elle.

Sophie est, finalement, un pantin aux mains des adultes, tantôt choyée, tantôt rejetée pour ce qu’elle représente. Tout est fait pour que l’on se rende compte de la manipulation constante à laquelle la jeune Ecuyère est soumise : le roman s’ouvre sur des manigances, sa vie est dictée par les dessins des autres, il s’achève sur les ultimes plans d’autrui.

Elle doit obtenir Baldré, tenu en haut d’une falaise mortelle par un Hermite de pierre ; la montagne est devenue vivante, consciente, sous la magie de la relique et le temps passé, et Sophie doit prouver sa valeur. Pourtant, ce n’est pas sa grandeur d’âme, son cœur qui est éprouvé, mais son endurance, sa ténacité.

Elle cherche Lunde, cette Excalibur perdue, dont seul Myrrdin, le magicien éternel, époux de la plus grande Reine, en connait l’emplacement. Elle part en quête et en bouscule les codes ; ce n’est pas à l’issue de celle-ci qu’elle se révèle à elle-même, qu’elle apprend sur le monde, sur le cosmos, c’est pendant. En réalité, à l’issue de sa quête, l’héroïne est plus déroutée que jamais, la vérité qu’elle avait trouvée sur le chemin s’est envolée.

Si les thématiques semblent de prime abord classiques, avec une Elue, des professeurs, une guerre qui se profile durant laquelle elle se révèlera, durant laquelle elle obtiendra la gloire, Jeanne Mariem Corrèze retourne pourtant complètement ces topos, et le fait avec brio. Acquillon, la figure tutélaire et ancestrale, celle qui guide l’Elue, celle qui a choisi l’Elue, est en réalité détestable. Tout en elle respire la manipulation, et l’autrice réussit à montrer l’ambivalence de cet archétype si courant dans la fantasy : un adulte, plein de connaissances, de pouvoir, qui destine un trop jeune personnage au destin qu’il rêvait pour lui-même, en se positionnant pour cela comme une figure bienveillante, qui n’a, en réalité, que faire du personnage pour lui-même. Acquillon, je l’ai détestée, pour ce qu’elle représente, pour ce qu’elle fait endurer à Sophie, pour le peu de foi qu’elle a en l’Ecuyère, qui n’est pas dupe.

Elle n’est pas le seul protagoniste si bien réalisé de ce roman : opposée et pourtant semblable à la Matriarche, Frêne est un personnage complexe, qui, si elle participe à la manipulation initiale, tisse cependant un réel lien avec Sophie. Là où le magicien et la Matriarche ne voient en elle que le vaisseau de leurs ambitions, la vieille cavalière y voit Sophie, une jeune fille perdue qui cherche un guide.

De même, l’amitié entre Pèn et Sophie est véritablement touchante, si poétique, si viscérale, une amitié féminine comme on en voit rarement dépeinte si brillamment dans la littérature ou dans le cinéma.

A travers les citations des œuvres intérieures et propres à l’univers, des livres d’histoire du royaume, des recueils de chants, aux discours, etc. et par le récit en lui-même, on nous offre un aperçu de ce monde, dans lequel nous ne sommes plongés que pour un bref moment, spectateurs d’un des engrenages de l’Histoire et non de l’Histoire elle-même. On ne saura rien de ce qui arrive après les évènements narrés, ni de ce qui est arrivé avant : ce roman agit comme un tableau qui n’offre à la vue qu’un instant précis du monde.

Le roman a été tout du long magnifique ; la fin est cependant magistrale. Elle m’a littéralement coupée le souffle et j’ai rarement été aussi estomaquée par une fin si ouverte, si subtile, si abrupte, si géniale.

C’est un chant qui, je l’espère, raisonnera haut et fort ; c’est un monument, un futur classique.

Three Dark Crowns, Kendare Blake

Elle rit et penche la tête au-dessus du vide. Pietyr ne peut pas imaginer ce qu’elle ressent en tant que reine. C’est un lieu destiné à son espèce. […] Elle pose sa tête sur sa main et continue à regarder au fond de la fissure. Pietry a raison. Elle ne devrait pas ressentir une telle fascination.

À chaque génération, sur l’île de Fennbirn, des triplées voient le jour : trois reines, toutes héritières légitimes de la couronne et chacune détentrice d’une magie convoitée.

Mirabella est une puissante élémentaire, qui a le don d’allumer des flammes affamées ou de déclencher des tempêtes vicieuses. Katharine est une empoisonneuse, capable d’ingérer les poisons les plus mortels sans en subir les effets. Arsinoé, une naturaliste, a la capacité, dit-on, de couvrir les arbres de fruits et de contrôler les animaux les plus féroces.

Mais pour obtenir le trône, la naissance ne suffit pas : le pouvoir se gagne au prix du sang. La nuit où les trois soeurs atteignent leurs seize ans, les hostilités sont lancées. Elles ont un an pour s’entretuer.

De cet affrontement à mort, une seule sortira vivante et emportera la couronne !


Three Dark Crowns. Le titre est déjà de bon augure et tout de même rudement badass (notez la qualité de cet argument). Il annonce directement la couleur, tout en mettant parfaitement en lumière le paradoxe qui régnera dans le roman : trois reines pour une île, qui n’en veut qu’une seule pour régner depuis sa noire cité.

Comment s’y prend-on pour faire décroître le nombre de reines ? Rien de plus simple, on les pousse à s’entre-tuer, une année durant, en suivant des rituels macabres.

L’univers de cette série de romans est très riche, et l’autrice nous le dévoile petit à petit, à travers une narration plurielle, alternant entre les trois reines. Bien que l’histoire se déroule sur une île, au sein d’une population en quasi-autarcie, elle n’en demeure pas moins vaste, assez pour qu’existent des différences culturelles fortes entre régions. C’est un point que j’ai trouvé très intéressant : c’est un peuple insulaire qui ne faisait autrefois qu’un, mais qui a été inévitablement divisé par des pratiques religieuses qui les ont menés à s’opposer entre eux. Lorsque l’on pénètre dans cet univers, on aperçoit une réelle dichotomie entre d’un côté le sentiment d’appartenance de chacun à l’île et leur conscience de descendre d’une même divinité, et de l’autre, leur ferveur à voir une reine dotée du même don qu’eux monter sur le trône.

Cette dichotomie a son pendant parfait dans la royauté. Les trois reines sont trois triplées en réalité, issues de la même mère, dont les pouvoirs différents découlent pourtant de la même Déesse. L’une est empoisonneuse, l’autre est élémentaire, la troisième naturaliste ; séparées à leurs six ans, elles sont élevées auprès de leurs pairs, qui tentent d’en faire de parfaites assassines, pour qu’elles puissent briguer la couronne et ainsi les favoriser.

Aucune d’elles ne veut mourir ; il semble impensable de se rebeller contre l’ordre établi. Pourtant, la présence de la Déesse est de moins en moins palpable, deux reines semblent même n’avoir aucun don. Les habitants de l’île s’attachent donc désespérément aux rites d’une religion moribonde : le Temple a brisé sa neutralité rituelle et soutient ouvertement l’une des reines, les fidèles se font de plus en plus rares, une reine n’est pas vue autrement que comme du bétail qui va se faire abattre, on veut truquer les rituels pour faire survivre sa protégée.

Tous les puissants spéculent, manigancent, tentent de damer le pion adversaire sur cet échiquier à trois dimensions.

Mais les reines ne veulent pas mourir ; elles aiment, elles ressentent, elles vivent. Avant d’être reines, elles sont humaines.

Et pourtant, deux d’entre elles doivent être tuées et leur temps est compté si elles veulent trouver le moyen de se protéger, de s’attirer les faveurs de potentiels alliés, de tuer, de survivre. Déjà Beltane s’approche, et, avec lui, l’ouverture de l’Année de l’Ascension.

Ce sont ces quelques mois préparatoires, fruits d’années d’entraînement, de machinations, de complots, que l’on suit dans ce premier tome. On y découvre un à un les personnages, leurs forces, leurs faiblesses, leurs joies et leurs peines. La mort rôde autour d’elles et pourtant, elle a une démarche différente pour chacune des reines. La Reine empoisonneuse l’accueille comme une parente, la Reine naturaliste la redoute, la Reine élémentaire veut l’éviter.

Malgré son statut de premier tome, et la nécessaire mise en place de l’univers, du folklore de l’île, de sa relation étrange avec le continent, ces terres dénuées de dons qui envoient des prétendants dont l’un deviendra roi consort, Three Dark Crown maintient un rythme soutenu, si bien qu’il est impossible à lâcher. La narration y est pour beaucoup, grâce à cette oscillation incessante et équitable entre les trois reines. Libre à chacun, chacune de choisir sa préférée ; les triplées sont toutes humaines avant d’être reines, et aucune d’elles n’est diabolisées. Elles sont, avant tout, victimes de leur couronne et de ce qu’elle implique, victimes de traditions auxquelles la plupart ne croit plus, victimes d’une Déesse cruelle, qui les fait naître pour se repaître de leur sang.

A mesure que l’on en apprend sur ce monde, nous pouvons également spéculer : comment ce fait-ce que deux reines ne présentent aucun don ? Pourquoi personne n’a jamais essayé de leur en faire maîtriser d’autres ? Pourquoi ne pas se rebeller ? Vont-elles le faire ? Le peuvent-elles seulement ?

Leur vie tout entière a été dictée, jusqu’à son terme pour deux des reines ; seuls des éléments extérieurs, voire la volonté de la Déesse, pourraient influer sur ces destins tragiques.

Ce tragique est un aspect qui a été très bien travaillé à mon sens : nous connaissons la gagnante désignée, les autres semblent se débattre vainement contre une destinée implacable. Elles luttent pourtant, toutes ignorantes des machinations que les puissants font dans leurs dos ; c’est un point immensément paradoxal, ce qui lui donne par ailleurs toute sa saveur. Les reines le sont, certes, mais elles sont avant tout des enfants : elles n’ont que seize ans.  Comment, dès lors, ne pas les prendre en pitié ?

C’est donc une sorte de roman d’intrigues politiques sur fond de dark fantasy, qui s’évertue cependant à montrer que chaque parti est constitué d’êtres humains ; derrière chaque muraille de force, se cachent la faiblesse des mêmes sentiments qu’éprouvent les lecteurs et lectrices.

Si je reste assez évasive, c’est parce qu’en dire plus gâcherait le plaisir de cette lecture. Sachez cependant que les personnages sont tous hauts en couleurs, et que chacun se démarque à sa manière. Tous ont leur importance, tous ont un rôle à jouer, même si ce n’est pas forcément celui auquel on s’attend.

Tout ça pour dire que Leha Editions avait raison en nous la vendant si bien : cette série est une pépite (mais comment en douter, puisqu’elle a été écrite par l’autrice de Fille des Cauchemars) et elle ne vous décevra pas !

Par le passé, c’est dans ce gouffre qu’on jetait le corps des reines qui n’avait pas survécu à leur année de l’Ascension. Geneviève affirme qu’au fond leurs corps forment des petits tas, brisés. Mais Katharine n’y croit pas. Le domaine Breccia est si vaste et si profond, ces reines ne sont certainement pas brisées au fond. Non, elle doivent encore être en train de tomber.

Le Temps du Teuz, Morgan Of Glencoe

Un peu plus tard, alors que tout le monde était parti se coucher, elle descendit à pas de loup dans le jardin… et nu-pieds dans la neige, elle dansa pour une tempête imaginaire bercée par des vagues invisibles.

Dans le monde de La Dernière geste, on offre lors du solstice d’hiver des cadeaux en toute discrétion. Seul un indice laissé opportunément permet de découvrir qui en est l’auteur. Une manière de faire qui provoque des grands moments de complicités, d’amitiés, d’amour… et de drame !
Avec le
Temps du Teuz et autres nouvelles, rentrez dans l’univers de Morgan Of Glencoe, l’autrice de Dans l’Ombre de Paris, L’Héritage du Rail et Ordalie, une série entre uchronie, féérie et steampunk qui a reçu les prix Elbakin.net, Vampires & Sorcières et Bookenstock.


Un hors-série un peu hors du temps, Le Temps du Teuz nous emmène en plein cœur de l’univers de la Dernière Geste pour partager cette fête si spéciale qu’est le Teuz chez les Keltiens. Alors on va se chercher un mug chaud de ce que vous voulez, un snowy cake digne de Lord Clifford, on s’installe dans un fauteuil confortable avec un bon plaid et c’est parti !

Parce qu’on ne pouvait décemment pas rester sur une fin de tome comme celle du troisième opus, l’autrice nous a gâtés pour la saison hivernale avec ce recueil de nouvelles qui relate une fête du Teuz pour chaque personnage principal de son univers. Personnage mort, vivant, absent, présent, les voilà tous, à différentes époques, différents endroits, pour la fête du Teuz qui a été spéciale à leurs yeux. C’est donc un recueil de nouvelles fort en émotion, qui sent bon la nostalgie, la mélancolie mais aussi la joie et le bonheur d’être entouré de ceux qu’on aime.

Comme toujours, la plume de l’autrice nous fait voyage à travers son univers avec facilité et poésie, sans effort aucun de notre part pour s’immerger dans cette ambiance festive et intime, en bonne compagnie autour d’un feu de cheminée.

J’ai eu beaucoup de mal, quand me l’a demandé l’autrice durant la dédicace, de dire quelle a été la nouvelle que je préfère. Comment choisir entre ces personnages si attachants, si beaux, si authentiques, qui nous révèlent, l’espace de quelques pages, un moment qui leur est cher à leur cœur ? Moi j’en suis incapable ! Alors je dirais simplement merci à Morgan of Glencoe de nous avoir offert ce petit moment parmi des personnages que, parfois, nous n’avons pas eu la chance de rencontrer vivants dans la Dernière Geste, et d’avoir prolonger ce moment pour ceux que l’on a côtoyé et aimer.

La Fille Feu Follet, Ursula LeGuin

Capturées par des hommes de la Couronne, deux fillettes devenues esclaves découvrent le monde et le système social de la Cité, le peuple-poussière et les Racines. La Fille feu follet est un récit poignant dans la pure tradition des contes de Terremer.
Cet ouvrage vous fera aussi explorer la poésie d’Ursula K. Le Guin son sens de la répartie et de l’analyse, dans un éloge de la modestie et de la lecture, mais aussi une interview singulière, et des articles signés Aurélie Thiria-Meulmans, traductrice, soulignant la profondeur de l’œuvre poétique de cette autrice majeure, baignée d’écriture dès le début de sa vie.
Plongez et découvrez de nouvelles facettes d’une des plus grandes autrices de la science-fiction !


La sortie chez ActuSF de deux recueils d’œuvres de et sur Ursula Le Guin a été l’occasion pour moi de découvrir cette autrice qui était depuis longtemps dans ma Pile à Lire. J’ai beau être une lectrice chevronnée, j’apprécie toujours un petit format pour tremper les pieds dans l’encrier d’une nouvelle plume, de nouveaux univers.

La fille Feu Follet est donc le premier écrit que j’ai lu du monument qu’est Ursula Le Guin. J’ai tout de suite été happée par sa plume, sa manière si singulière de peindre un univers, ses enjeux, ses coutumes, ses relations, en si peu de mot. D’emblée, elle nous emporte dans ce nouveau monde aux moeurs et coutumes codifiées, différentes. C’est à travers deux anonymes, deux petites filles comme il y en a eu tant d’autres, comme il y en aura encore tant, que nous voyageons dans leur nouveau chez elle. Une première expérience de l’autrice qui m’a ravie !

La suite du recueil ne comporte pas de nouvelles ; c’est un assemblage très intéressant et éclectique de ses essais, de ses discours mais également d’articles de spécialistes d’Ursula Le Guin. Cela permet d’embrasser toute la diversité, tant en genres qu’en sujets, de l’autrice. Dans cette anthologie, on la découvre sous divers aspects, sous differents angles, qui semblent essentiels pour apprécier toute la richesse de cette autrice.

Diluées, Collectif

– J’étais shootée quand j’ai écris les paroles.
– Shootée ou inspirée ?
– Est-ce si différent ?

Te souviendras-tu de moi et de tous ces jours où la passion a triomphé ? J’ai pris toutes les formes et ai voyagé à toutes les époques. J’ai exploré toutes les régions, tous les silhouettes. Je suis changeant, mobile, fluide et langoureux. Les amours qui m’honorent sont diverses, elles l’ont toujours été. Laisse-moi te guider au creux de mes souvenirs, prends les formes que j’ai prises, salue les corps que j’ai enlacés. Me suivras-tu à ton tour ? Me rencontreras-tu dans cette vie-là ?


Un recueil de nouvelles assez étrange et original, qui nous a donné l’idée suivante :

une chronique exquise ! Et pour l’occasion, nous avons sorti nos couleurs préférées, Nawal le bleu, et Cassie le violet.

On remercie à cette occasion ActuSF pour l’envoi de cette oeuvre qui nous a charmé l’une et l’autre, et on espère que notre avis vous plaira.

Ereshkigal – Morgane Stankiewiez

Une nouvelle assez particulière, de la SF, ce qui n’est pas mon genre de prédilection ordinairement.

Et pourtant, l’ambiance si étrange m’a vite convaincue, avec cet univers sale, glauque, et en même temps trop aseptisé.

Le personnage, auquel on a un peu de mal à s’attacher au début, nous séduit peu à peu au fil de son étrange pérégrination.

Et quelle pérégrination ! Une catabase, rien de moins, une belle réécriture de ce topos de la littérature antique.

Topos littéraire antique qui invoque un mythe mésopotamien, d’Ishtar et d’Ereshkigal, deux sœurs rivales.

Bref, nos petits coeurs de Lettres Classiques sont comblés. D’autant plus qu’elle permet un renouveau, une redécouverte du soi : Anna se défait de ce qui la retenait attachée aux cieux, et ce n’est qu’une fois ce passage achevé, qu’elle peut redécouvrir qui elle est, qui elle veut être.

Couleur d’écume – Morgan of Glencoe

Des pirates ! Et des pirates écrites par Morgan of Glencoe ! Comment ne pas tomber amoureuse de ces reines de la mer portées par la plume d’une autrice talentueuse au langage fleuri ?

Impossible en effet, d’autant qu’elle sait manipuler ses personnages avec brio pour nous faire vivre à travers eux. Nous sommes totalement immergées et les sensations vécues par les protagonistes nous arrivent en plein visage, comme la mer se fracassant sur une falaise.

Que rajouter de plus ? Des personnages avec du caractère, des sensations qui prennent aux tripes, une intrigue qu’on ne veut pas quitter, le tout dans une plume térébrante.

Voeux électriques – Karine Rennberg

Nawal me tannait pour lire Meute, me vantant les mérites de la plume de l’autrice… Eh bah je comprends bien mieux maintenant. La narration, cette 3ème personne qui s’adresse au lecteur, qui virevolte dans l’intrigue… C’est tout simplement électrisant.

Aussi électrisant que ce que partagent les personnages entre elles. Cette divinité qui se propage autant dans la narration que dans l’air et les corps, nous guide à travers l’histoire de beaux personnages auxquels on s’attache énormément.

Elles sont si différentes, et pourtant si semblables. L’une est ingénieure dans l’âme, l’autre a soif de connaissances. Elles s’aiment, semblablement, elles s’aiment, différemment.

Bouches d’Incendie – Cordélia

Ah, le personnage de Sam… Un véritable coup de coeur. Sa fragilité, sa détermination, l’eau qui éclate de la bouche d’incendie.

Cette eau qui revient d’ailleurs sans cesse, tel le fil d’Ariane à travers le labyrinthe, et qui relie nos personnages entre eux. Sam donc, avec sa vulnérabilité et son authenticité, frappe en plein coeur.

C’est une lecture qui reste par couleurs, par impression, par son protagoniste principal. Plus que l’intrigue, c’est bien tout cela qui m’a charmée.

Vielles connaissances – Nadège Da Rocha

Des chevaleresses ! Et des chevaleresses qui n’ont pas leur langue dans leur poche si je puis me permettre !

Quel plaisir de lire une histoire qui met en scène des femmes fortes, indépendantes, et qui pourtant ne sont pas du tout semblables. Quel plaisir également que de voir des protagonistes âgées, dont l’heure de gloire a sonné depuis longtemps !

Mais cela ne les arrête pourtant pas, les personnages restant pleine de courage et de vaillance. Ce qui m’a le plus touchée reste la certaine vulnérabilité Viviane, cachée derrière un caractère bien trempé et une personnalité bornée.

J’ai beaucoup apprécié cette réécriture et cette réinterprétation féminine des chevaliers de la table ronde… Viviane et Morgane ont choisi un autre chemin que celui imposé par des siècles de tradition, faisant des femmes des saintes ou des putains, sans nuances.

Alpha Beauty – Théodore Koshka

Si j’ai trouvé intéressant d’un point de vue linguistique les innovations de genres appliqué à la langue, le tableau était assez conséquent, et un peu indigeste pour qui n’est pas habitué à ce genre. J’avoue ne pas avoir dépassé celui-ci, parce que les A/B/O-verse ne sont vraiment pas ma tasse de thé, puisque je suis facilement heurtée par ce qui touche au (non)-consentement, ces univers franchissant ma limite personnelle.

Ce fut quant à moi ma première expérience de l’A/B/O-verse, qui m’a laissé assez perplexe, n’ayant vraiment pas l’habitude de ce genre de narration. J’ai été assez souvent perturbée dans ma compréhension, ce qui a rendu ma lecture assez difficile et assez peu agréable en fin de compte. Mais cela reste tout de même assez intéressant de s’ouvrir à une nouvelle forme d’écriture et de vision du monde.

Comme un soleil – J. M. Corrèze

Quelle poésie ! Cette nouvelle, splendide, nous plonge au plus profond du divin, nous donne un point de vue finalement peu exploré : celui de l’amour inconditionnel d’une divinité pour ses fidèles.

Une divinité attachante, qui voit les humains naître et mourir sans que jamais son amour ne s’amenuise.

Elle devient la voix de son peuple, celle qui se souvient d’eux, de leur épopée, de leurs innombrables traversées d’étendue d’eau, qu’elle redoute pourtant tant. C’est elle qui, en l’espace de quelque page, nous fait connaître son peuple, nous raconte son histoire, don divin de celle qui est louée et révérée par toute une civilisation.

Un recueil très intrigant, intéressant, multiple. Plus que de l’érotisme, c’est avant tout de belles photographies littéraires de ce que sont les amours, dans toutes leurs riches variétés.


Un petit ovni qui mélange les genres, des personnages divers et uniques, portés par des belles plumes own voice où chaque récit a sa petite patte.

Circé, Madeline Miller

Je dirais que certaines personnes sont comme des constellations qui ne touchent la terre que l’espace d’une saison.

Fruit des amours d’un dieu et d’une mortelle, Circé la nymphe grandit parmi les divinités de l’Olympe. Mais son caractère étonne. Détonne. On la dit sorcière, parce qu’elle aime changer les choses. Plus humaine que céleste, parce qu’elle est sensible. En l’exilant sur une île déserte, comme le fut jadis Prométhée pour avoir trop aimé les hommes, ses pairs ne lui ont-ils pas plutôt rendu service ? Là, l’immortelle peut choisir qui elle est. Demi-déesse, certes, mais femme avant tout. Puissante, libre, amoureuse…


Circé, magicienne, tante de l’effroyable Médée qui s’avère être mon personnage mythique préféré. Quelle joie de découvrir son histoire, non pas à travers les yeux des autres héros, mais des siens. Son histoire si pleine de solitude, de regrets, de remords mais aussi de courage, d’indépendance et d’amour.

Nous suivons en effet la longue vie de Circé, de sa naissance jusqu’à…. spoiler. Cette sorcière mystérieuse, intrigante, voire inquiétante que l’on connaît principalement selon le point de vue d’Ulysse, dévoile ici toute son histoire sans fortiori, sans filtre. Son enfance aux pieds de son père Hélios, rejetée par les autres, sa mère la première, sa jeunesse solitaire et naïve, sa fascination pour les mortels, son exil injuste, sa solitude qui la ronge durant une éternité, ses rencontres, tantôt dangereuses tantôt salvatrices. Tout y est. Et bien sûr, sa magie.

Laissez-moi vous expliquer ce que la sorcellerie n’est pas : ce n’est pas un pouvoir divin, qui vient en un clin d’œil, d’une simple pensée. Elle nécessite d’agir, de manipuler, de planifier, rechercher, fouiller, sécher, couper et moudre, bouillir, parler et chanter. Et même après toutes ces étapes elle peut échouer, ce qui n’arrive pas aux dieux. 

Circé magicienne. Circé sorcière. Merci, Madeline Miller, pour cette ode à la sorcellerie, à la magie des herbes et des sorts qui m’a totalement charmé. J’ai adoré apprendre la science des plantes et des charmes aux côtés de Circé, à la suivre dans ses jardins et forêts à la recherche du bon ingrédient, dans sa cuisine, à la recherche de la bonne méthode. C’était passionnant ! Cela fait partie de mes parties préférées du roman.

À cela s’ajoute également l’entrelacement aux autres mythes : Scylla, Dédale, Pasiphaé sa sœur et son enfant le Minotaure, Thésée et Ariane, et bien sûr Ulysse. Ulysse que l’on découvre sous un nouveau jour, déjà esquissé dans Le Chant d’Achille, plus sombre, plus dangereux que la version embellie qu’il nous présente dans son Odyssée.

Dans une existence solitaire, il existe des moments rares où une autre âme plonge tout près de la vôtre, comme les étoiles qui s’approchent de la terre une fois par an.

Et au centre de tout cela, Circé. On en revient toujours à elle et sa personnalité si unique chez les immortels. Enfin unique… avec Prométhée. Car les deux sont liés par leur amour et leur fascination pour les mortels, qui leur vaudra le mépris des autres et une éternité d’exil. Pourtant, Circé s’empare de cela pour en faire une force, pour s’émanciper et devenir un personnage fascinant, auquel je me suis énormément attachée. Si je l’aimais déjà beaucoup, avec cette histoire, elle vient définitivement se loger dans mon cœur aux côtés de sa nièce. Sa douleur, sa douceur, ses pensées, m’ont envahi tout au long de ma lecture et me hanteront encore après.

Quelqu’un se souviendra de nous, Nadège Da Rocha

« C’est l’avantage d’être au cœur d’un mythe : mon histoire me précède toujours où que j’aille. Qu’ils essayent de nous attaquer s’ils le veulent, nous verrons bien qui seront les perdants. »

Elles ne pardonneront jamais à l’Olympe. Les dieux vont enfin payer !
L’ère des faux-semblants est révolue. Pandore est prête à traverser le monde pour se venger de Zeus et des dieux qui l’ont condamnée à la honte et à la culpabilité. À ses côtés, elles trouvera deux alliés inattendues, piégées comme elle par la malice de l’Olympe : Méduse et Arachné, deux monstres qui veulent prouver qu’elles sont bien plus que cela. Leur épopée vengeresse les mènera jusqu’aux Enfers, où elle comprendront que les dieux disparaissent déjà mystérieusement… Le temps leur est compté !


Le jour même de sa sortie, je terminais ce roman. Ce roman que j’attendais avec énormément d’impatience, moi l’étudiante en Lettres Classiques passionnée par la mythologie et le monde hellénique. J’en attendais donc beaucoup de cette sortie, signé chez ActuSF qui me déçoivent pratiquement jamais. Mais comme toute chose dont on attend beaucoup, il y a parfois des petites déceptions, même si ma lecture fut principalement agréable.

Commençons d’abord par le positif. Parce que malgré tout, cela a été une belle lecture, avec des points forts, et le premier est la diversité. Merci Nadège Da Rocha de rétablir la couleur de peau des dieux et déesses ! Parce que oui, les divinités grecques ne sont pas aussi blanches que le marbre de leurs statues. Ce sont des divinités du monde méditerranéen, peuple qui n’est pas réputé pour leur peau blanche comme neige….

Ils la disaient victime.

Merci également de mettre les femmes à l’honneur, parce que oui, la mythologie grecque ce n’est pas uniquement Zeus, Poséidon, Hercule ou Achille. C’est aussi Pandore, Héra, Artémis, Méduse, Arachnée et bien d’autres femmes qui ont été traitées de manière misogyne pendant des siècles et des siècles, les réduisant au silence et au statut de simple objet, de récompense ou de monstre.

Ils la disaient belle. C’est bien tout ce qu’ils retinrent d’elle.

Et c’est bien là le point fort de ce roman. Quelqu’un se souviendra de nous met à l’honneur les figures féminines qui peuplent cette mythologie en leur rendant leur voix, et en remettant en question le regard masculin posé sur ces femmes réduites à l’état de ressort narratif. On ne connaît que trop bien l’histoire de Méduse, monstre à têtes de serpents que le valeureux Persée décapite. On en connaît que trop bien l’histoire de Pandore, la Porteuse de maux, qui fait s’abattre sur les mortels tous les maux du monde à cause de sa curiosité. Mais connaît-on la Pandore aux Mille Cadeaux ? Que savons-nous de Galatée, hormis le fait que ce ne soit que l’objet de l’amour de Pygmalion ? L’histoire d’Arachnée est-elle connue de tous ? Connaissez-vous Héra autrement que la femme jalouse et revancharde de Zeus ?

Ils la disaient sauvage

Si la réponse est non, l’autrice vous livre ici leur histoire, selon leur point de vue, avec leur voix propre. Elle convoque toutes les divinités et les figures féminines (ou presque, je déplore l’absence de l’incroyable Médée !) dans une épopée révolutionnaire qui va s’abattre sur un patriarcat subi depuis bien trop longtemps.

Ils la disaient folle et menteuse.
Princesse, oracle, destructrice.

Néanmoins, comme dit plus haut, il y a eut quelques petites déceptions.

Le style d’écriture m’a laissé perplexe. Il y a un quelque chose d’ancien, d’antique, mélangé à du moderne, qui, pour moi, ne fait pas bon ménage. Il y aurait un parti à prendre, comme Percy Jackson qui modernise totalement le style et l’univers de la mythologie ou alors, comme Madeline Miller le fait pour Circé et le Chant d’Achille, gardé une poétique antique. Ici, le mélange est assez étrange et déstabilisant, qui ne fonctionne pas pour moi.

Mais ce qui m’a le plus dérangé c’est que l’on retombe dans un schéma assez manichéen. On oppose systématiquement les femmes aux hommes. Alors oui, il y a quelques exceptions, mais qui font office de figurants et c’est bien dommage. Une écriture plus nuancée, plus approfondie aurait été bienvenue dans ce beau projet féministe. Car, pour moi, le féminisme n’est pas la revanche des femmes sur les hommes mais l’égalité entre les deux, l’union sincère et équitable et ce n’est pas vraiment ce que j’ai retrouvé dans ce roman.

L’intrigue m’a également souvent laissé perplexe, la trouvant tantôt simpliste, tantôt brouillée, notamment sur la fin où l’enchainement des événements s’est accélérée, ce qui a compliqué ma compréhension, de même que certains mots de vocabulaire qui aurait été pertinent, je pense, de mettre en note ou de faire un glossaire à la fin. Baignant dans le latin et le grec depuis cinq ans maintenant, cela n’a pas trop dérangé ma compréhension, mais ce n’est pas le cas de tout le monde.

Ils la disaient épouse. Ils la disaient jalouse.

Néanmoins, malgré ces quelques déceptions, cela reste un beau roman avec une belle volonté de redonner voix au chapitre à des femmes qui ont autant de belles histoires à raconter qu’Achille et Ulysse.

Cemetery Boys, Aiden Thomas

« Strictement parlant, Yadriel ne s’introduisait pas dans une propriété privée puisqu’il avait vécu toute sa vie dans le cimetière. »

Parce que sa famille latinx a du mal à accepter son genre, Yadriel veut leur prouver à tous qu’il possède les pouvoirs d’invocation des hommes et non pas celui de guérir, comme les femmes. 


Voici un nouveau livre acheté lors de la fièvre dépensière du SLJP (mais si, vous vous souvenez, la petite blonde avec la moue contrite devant son sac anguleux tellement il était rempli de livres…) !

La couverture m’avait beaucoup attirée, j’ai lu la première ligne du résumé et je savais que j’allais l’acheter. Malgré ce que l’on pourrait croire, j’ai de vrais critères de sélections ! Il s’avère juste que Nawal sait exactement où m’emmener pour dépenser mes précieuses économies.

Retournons à nos moutons, ou plutôt à nos pierres tombales.

Comme le laisse aisément deviner le titre, cette histoire se déroule *roulement de tambours* dans un cimetière ! Et ça parle de garçons.

Allez zou, n’hésitez pas à revenir pour de nouvelles chroniques !

Trêve de plaisanteries, venons-en au cœur du sujet… Cimetery Boys suit les pérégrinations de Yadriel et de Maritza, suiveuse volontaire, ravie de se fourrer dans les histoires de son cousin. Ce dernier se bat pour faire entendre sa voix auprès de sa famille et de sa communauté : il n’est pas une bruja, mais un brujo, et il estime avoir tout autant le droit que les autres de perpétuer les traditions ancestrales des siens, de se présenter à la Santa Muerte, et d’accomplir la cérémonie qui lui permettra d’aider Leur Dame La Mort à guider les esprits égarés dans l’au-delà.

Seulement voilà, Yadriel est trans, et pour son père, chef des brujx du cimetière d’East LA, il ne pourra jamais être un vrai brujo. D’ailleurs, on lui refuse tout simplement de prendre part à la vie communautaire des adultes ; il est tout juste bon à faire ce qu’on demande aux enfants.

Alors Yadriel se rebelle, pour le plus grand plaisir de Maritza, sa cousine qui refuse de soigner avec du sang animal. Il l’aura sa cérémonie des quinces, dusse-t-il la faire avec Maritza pour seule témoin. Il l’aura sa dague bénie par Leur Dame La Mort, dusse-t-il la faire faire en secret par Maritza, fille du forgeron de leur communauté. Il aidera un esprit à passer tranquillement dans l’au-delà, dusse-t-il se taper un mec relou avec un sévère trouble de l’attention comme premier mort.

Mais la vie de Yadriel n’était pas assez compliquée comme elle l’était, manifestement, puisque Miguel, un autre de leur cousin, disparaît subitement lors d’une ronde au cimetière. Pire que ça, tous les brujx sentent sa mort… loin d’être paisible, bien au contraire.

Une course contre la montre s’engage alors : retrouver Miguel, aider cet esprit insupportable à traverser tranquillement, faire ses preuves à son père, à sa communauté, à lui-même, tout ça avant que minuit du 31 novembre sonne, annonçant le début du Día de Muertos.

Vous l’aurez compris, ce roman se déroule donc dans l’atmosphère colorée, chatoyante et mortuaire des quelques jours qui précèdent l’une des fêtes les plus connues des communautés Latinx : le Jour des Morts. L’auteur nous fait ici la fleur (d’Indes, vous le découvrirez !) de nous immerger dans sa culture, dans l’effervescence qui règne avant cette célébration si spéciale pour les personnages que nous suivons. Petits plats, grands plats, énormes casseroles, on goûte le temps de notre lecture à la cuisine de Lita, la grand-mère de Yadriel et cheffe spirituelle du cimetière, celle, vegan, de la mère de Maritza. Nous sommes invités à découvrir les rites, les pratiques et les joies de ces communautés multiculturelles, dans une narration toute en couleurs. C’est une véritable lettre d’amour à sa culture qu’a ici écrite Aiden Thomas, qui m’a rappelé la chaleur des fourneaux et des célébrations de la mienne. Les personnages sont bilingues, parfois avec de gros accents dans leur langue d’accueil. Ils en changent à loisir, mêlant joyeusement espagnol et anglais, tout en restant intelligible pour les non-hispanophones.

L’approche est d’autant plus émouvante qu’elle vient de Yadriel, pourtant mis à la marge de sa communauté par les siens parce qu’il ne rentre pas dans le moule millénaire des traditions. Et pourtant, il aime sa famille, sa communauté, ces us et coutumes.

Il désire réellement leur montrer qu’au-delà de la différence qu’ils n’arrivent pas à surmonter, il a pourtant toute sa place parmi eux.

Cette thématique est d’ailleurs récurrente dans le roman : le sentiment d’appartenance, d’être aimé, d’être compris par ceux qui constituent notre entourage, de pouvoir être nous-mêmes, sans conditions, sans compromis, juste nous et rien que nous est au cœur de l’histoire. C’est ici une véritable réinterprétation du roman d’apprentissage : ce n’est pas le personnage principal qui se découvre, qui évolue, ce sont ses proches qui le découvrent, le ou la lectrice qui se voit évoluer dans son univers.

J’ai beaucoup apprécié ce roman, entre le policier, le surnaturel, la romance et la déclaration d’amour à sa culture. Les personnages sont tous différents, attachants et, à mon sens, très justes. A cela s’ajoute que ce livre est un own voice, c’est-à-dire que l’auteur est lui-même un homme trans, comme son personnage principal. Il n’hésite pas non plus à s’attaquer à des sujets de sociétés, comme l’appropriation culturelle ou la xénophobie et les clichés qui font rages contre les minorités, ici vues sous le prisme de la communauté Latinx.

En résumé, c’est un roman de Noël idéal pour celles et ceux qui sont nostalgiques de l’ambiance d’Halloween !

Le Silence des Carillons, Edouard H. Blaes

« Il disait que c’était dans les histoires que la magie résidait. Que c’était quand on en imaginait une qui n’avait jamais êté racontée qu’on lui donnait vie et qu’on lui donnait ses pouvoirs. Ses vrais pouvoirs. »

Ermeline Mainterre s’est promis de devenir une magicienne dont chacun connaîtrait l’existence. Pour cela, elle ne reculera devant rien. Pas même lorsque le monde connaîtra sa perte.

La lumière du soleil ne traverse pas la Brume, à Tinkleham. Contre la menace des Spectres qui planent aux abords de la ville et font disparaître ses habitants sans laisser de traces, les mages du Beffroi apprennent à manier les carillons pour les repousser. Ermeline a choisi cette voie et compte bien devenir la meilleure de tous, portée par ses rêves de grandeur, à la fois fascinants et terrifiants.

Mais les Spectres ne sont pas le plus grand péril en vue. Ermeline réussira-t-elle à graver son nom dans l’histoire ? Jusqu’où ira-t-elle pour devenir inoubliable ?


« Moi je pense qu’il y a du vrai et de la magie dans toutes les histoires, qu’il disait. »

J’ai rarement été aussi soufflée par une lecture. Je ressors de ce livre totalement sonnée. Elle est là, la catharsis d’Aristote. Cette héroïne ni héroïque ni méprisable, cette héroïne du milieu.

Qui est Ermeline Mainterre ?

C’est la question, si simple, si complexe, si terrible, qui sous-tend tout le roman.

Qui est-elle, cette Ermeline Mainterre ?

Une héroïne tragique. L’héroïne tragique antique de notre modernité. Elle évolue sous une plume terriblement efficace, qui porte sa voix, qui la fait résonner, dans les lettres, les mots, les chapitres, en nous.

Qui est Ermeline Mainterre ?

Une jeune fille qui aime la magie, qui veut être magicienne, qui a des idées plein la tête et la volonté de laisser une trace. C’est une adolescente qui veut être la meilleure, qui veut être retenue, qui veut être connue, qui veut être reconnue. Elle rêve de grandeur.

Et pourtant, c’est une apprentie magicienne terriblement moyenne.

Elle ne tient pas la comparaison avec son amie Justine, qui excelle en magie. Elle ne tient pas non plus la comparaison avec Mickral, vers qui sont tournés les yeux de Justine, cette Justine qu’Ermeline aime. Mais elle tient encore moins la comparaison avec Archie, si silencieux, qui connaît l’avenir sans jamais pouvoir le dire, magicien parce qu’il est devin.

« Je pense qu’on peut imaginer toi, moi, n’importe quoi, et cette histoire aura quelque chose de vrai, en fait. Quelque part, je ne sais pas chez qui ni quand, mais elle résonnera. »

Qui est Ermeline Mainterre ?

C’est une figure du tragique, dont le Destin est écrit, gravé dans le giron réconfortant d’une mère des suites d’un cauchemar d’enfant. C’est la figure tragique qui infléchit le Destin, qui commande au Destin, qui en comprend les rouages. C’est la figure tragique qui le réécrit, en lettres de sang. Ermeline Mainterre est finalement toutes les personnes qu’elle a jamais rencontrées, toutes les personnes qu’elle a aimées, amies, amis, parents, frères, Magisters.

Dans cet univers impitoyable, toujours brumeux, seule la mélopée éternelle des carillons protège Tinkleham des Spectres, créatures mortifères aux chants funestes. Ils sont attirés par les humains, qu’ils font disparaître au toucher. Point d’étoiles dans le firmament, point de doux rayons du soleil pour réchauffer le vent glacial, seul le chant des carillons, incessant.

Et pourtant, il va cesser, il doit cesser, c’est écrit, c’est dit, telle est la prophétie du titre, écrite par l’auteur, pérennisée par son lectorat. Le Silence de Carillons, le titre est lu, et il se réalisera. Impossible de lâcher notre lecture, de lâcher cet univers si riche, à la fois post-apocalyptique, pré-apocalyptique, et apocalyptique.

« Elle se fera la voix de ceux qui n’ont rien ou qui ne cherchent rien. Ceux qui trouvent, au détour d’une page sans vraiment savoir ce qu’ils font là, l’écho de ce dont ils avaient besoin, à cet instant. »

Impossible également de lâcher ses personnages, impossible de ne pas les aimer, tous. La narration y est pour beaucoup ; si elle se présente comme une traditionnelle narration à la première personne, c’est en fait les mémoires de l’héroïne tragique, si brillamment mis en scène avec les temps du passé, si étranges pour narrer des évènements présents.

Et pourtant, ces événements sont inéluctables puisqu’ils sont tragédie. Les personnages n’échapperont pas à leur destin, à leur don, à leur héroïsme.

C’est un récit bouleversant, une épopée magnifique, et le style de l’auteur, si poétique, si antithétique, si tragique, n’y est pas étranger. Édouard Blaes sait manipuler les images, les mots, la magie intrinsèque des histoires… et il le fait avec brio. Le titre est aussi poétique que l’est le reste du roman. Aussi bien construit que l’entièreté de l’histoire.

Qui est Ermeline Mainterre ?

Un chef-d’œuvre. Un chef-d’œuvre qui, pour paraphraser Mickral, résonnera, sera la voix, l’écho de ce dont on a besoin. C’est aussi une Poétique poétique.

Qu’est-ce qu’une histoire finalement ? C’est la deuxième question de ce roman. C’est de la magie, c’est de l’espoir, c’est du tragique, c’est une réponse, c’est une question, c’est notre magie.

Qui est Ermeline Mainterre ?

L’héroïne tragique qui bat le Destin en brèche, et qui pourtant évolue dans le même cadre que toutes les autres héroïnes tragiques avant elle ; toutes ses actions mènent, ont menées, à la résolution, à la fin, à ce terrible épilogue, si difficile à travers le voile de larmes.

Qui est, finalement, Ermeline Mainterre ?

Quelqu’un dont le monde aura besoin, au moins quelqu’un, quelque part, d’une manière ou d’une autre. L’héroïne d’un nouveau monde, qui a tous les codes, qui brisent tous les codes, de notre monde antique.

« Peut-être que c’est juste une image, peut-être que c’est juste un hasard. Mais je pense que toutes les histoires ont cette magie-là. Au moins. »

Mystic Flown, tome 1 : Le Maître des arcanes, Dana B. Chalys

« Les étudiants commencèrent à s’agiter. Des murmures formaient un bruit de fond sourd et détestable. Ils gagnèrent en intensité avec l’avancé de l’intriguant Sadge Bawen qui fendit la foule sans lui accorder la moindre attention. […] Si Sadge ignora tout le monde, il remarqua en revanche l’étudiante solitaire autour de laquelle s’était formé un large périmètre de sécurité. Cette dernière ne retint de lui que son odeur de pluie automnale. »

Une guerre de l’ombre couve depuis longtemps entre les royaumes du Continent. Dans ce jeu de forces et de magie, la découverte des armures robotisées mobiles devient l’enjeu stratégique de tous. Ces ARM, vestiges d’une civilisation disparue depuis 1200 ans, offriraient un avantage hautement dissuasif si elles voulaient bien révéler leur secret.

Mais la pièce manquante demeure introuvable. L’autre solution pour s’assurer la victoire serait de mettre la main sur le maître des arcanes porteur de l’as de la Mort et du Joker Sadge. Héritier malgré lui de ce pouvoir destructeur, il est traqué pour ses capacités et trouve refuge à la prestigieuse université des magies. Il y rencontre Diba, une émotionnelle que tout le monde fuit à cause de ses dons aussi dévastateurs qu’incontrôlables. Tous deux vont tenter de percer le mystère qui entoure l’origine des ARM, sans se douter que ces robots de guerre ne sont pas la pire des menaces à craindre.


En voyant la couverture absolument sublime de ce livre, puis en lisant le résumé, j’ai eu un coup de cœur immédiat. Coup de cœur renouvelé à la lecture !

Ce roman, premier d’une série qui sera je l’espère prospère, prend le parti de mêler fantasy et science-fiction et s’y adonne avec brio !

Nous suivons Sadge et Diba, deux âmes solitaires qui s’attirent par leur tristesse mutuelle, tout le long de leur première année à l’université de Puy-en-Embruns.

Le décor se pose doucement, avec précision, et nous fait découvrir au fur et à mesure l’univers, ses rouages, sa politique, ses enjeux.

Ici, magie et technologie sont liées, et elles sont indéniablement sources de tension et de manigances politique, assez pour traquer un enfant, devenu adulte au début du roman, sur dix ans, assez pour que chaque parti soit suspicieux et soupçonneux de l’autre. Assez pour avoir le potentiel de déclencher une guerre.

J’ai beaucoup aimé la narration, qui est à la fois presque omnisciente et clairement du côté de Sadge et Diba.  Elle a cette tendance à nous faire nous questionner sur les personnages et leurs intentions, tout en influant notre jugement pour nous mener dans le sens de celui d’un des étudiants.

Cette narration est d’autant plus intéressante, à mon sens, qu’elle offre des impressions différentes d’un même personnage en fonction de qui le rencontre : si Sadge a un avis très tranché et négatif sur une personne, Diba, qui n’a pas son passif avec celle-ci et qui a appris à toujours contrôler ses émotions, offre un regard différent, regard dans lequel la narration nous plonge totalement. Des personnages deviennent ainsi ambigus, complexes, mystérieux.

En parlant de personnages, ce roman en comporte de nombreux, aux caractères et aux histoires variées. On prend plaisir à les découvrir petit à petit, à les lire se construire, évoluer.

Sadge, s’il est présenté au début du roman comme un garçon fatigué de fuir, las de la solitude imposée par ses hautes valeurs morales, goûte pendant quelque temps à ce qu’il a toujours rêvé : une vie stable et entourée. Il détonne forcément dans ce milieu très guindé, où il s’imagine que toutes et tous ont eu une vie tranquille et dorée et où, il le sait, il n’a pas sa place en tant que fugitif ne se liant jamais avec personne. Et pourtant, il se prend au jeu, et se laisse embarquer dans ce qu’il a toujours voulu expérimenter : l’amitié, l’intimité, la familiarité.

Diba, quant à elle, est présentée comme une solitaire qui a un contrôle absolu sur toute sa vie… si ce n’est sur sa solitude. Parce que son pouvoir, lié aux émotions qu’elle ressent, est puissant, trop puissant, on la fuit ; personne n’ose s’en approcher, de peur de mourir, personne n’ose la contredire, de peur de la faire exploser de colère, personne n’ose… sauf Sadge, qui reconnaît en elle son désespoir solitaire.

J’ai beaucoup apprécié leur dynamique, si contraire et pourtant si semblable : Diba n’espère rien de la vie, elle la subit ; Sadge rêve d’un meilleur avenir, il subit son présent et son passé. Ce que l’un ne peut obtenir, il essaie de l’offrir à l’autre. Cela mène les deux personnages à évoluer, à explorer leurs émotions, leurs envies, parfois pour la première fois de leur vie, parfois au péril de leur vie.

La question de la volonté, du libre arbitre, et de ce que l’on fait de sa propre vie est réellement au cœur de ce roman. Seulement voilà, il n’est pas question de changement radical, de retournement de situation ; il s’agit d’essayer de sortir son épingle du jeu, de faire contre mauvaise fortune bon cœur, de s’offrir, envers et contre tout, et surtout contre le monde qui décide à la place des autres, le meilleur de ce que la vie peut nous donner.

Sadge est un fuyard, et il le restera. De même, Diba est exclue, et elle le restera. Et pourtant, ils se trouvent, se forgent une amitié qui leur est propre, qui fonctionne. Il s’ouvre, doucement, difficilement, par à coups, aux autres, elle prend confiance en elle, en ses capacités, en un avenir.

S’ils sont au début deux inconnus, ils deviennent à la fin de ce premier tome si familiers l’un envers l’autre, qu’ils semblent se connaître depuis toujours. Il la pousse ainsi à poursuivre ses rêves, elle le pousse.

Bien que le maître des cartes et l’émotionnelle soient les personnages principaux, les autres protagonistes ne sont pas en reste, et chacun est traité pour lui-même, bien que des zones d’ombre soient toujours présentes puisque la narration se concentre exclusivement sur ce qui touche à Sadge et Diba.

Si l’intrigue tourne autour de deux étudiants, ce n’est pas pour autant qu’ils sont coupés du monde, bien au contraire : leurs recherches s’effectuent sur des sujets brûlants d’actualité, puisqu’ils s’intéressent aux ARM, mécas de combat retrouvés lors de fouilles archéologiques il y a un peu moins d’une vingtaine d’années, et dont personne ne peut expliquer la présence. Civilisation perdue, qui n’aurait laissé derrière elle en tout et pour tout que ces robots et des traces archéologiques incohérentes avec ce niveau de technologie et de magie ? Ou le mystère est-il plus complexe, l’explication plus lointaine que cela ?

Une chose est sûre, toutes et tous, armé.e)s comme étudiants et étudiantes, intrigant(e)s de royaumes comme passionné(e)s de technomagie, veulent percer le secret de ces immenses bijoux de technologie, qui sont invincibles… ou presque.

Parce que dans ce monde où seul un faible pourcentage de la population peut invoquer la magie, chacun à des aptitudes différentes : certains sont plus doués avec les plantes, d’autres avec les pierres, d’autres encore lorsqu’ils font des rituels, etc. Cela crée un système magique complexe, varié, qu’il est intéressant de découvrir, d’appréhender. D’autant plus que chaque type de magie ne se ressemble pas, et que certains sont plus rares que d’autres. C’est le cas de ceux que maîtrisent nos protagonistes principaux, l’un étant maître de carte, c’est-à-dire que sa magie provient d’un jeu de cartes unique qu’il a reçu à la naissance, et qu’il doit apprendre à maîtriser plus ou moins par lui-même, l’autre une émotionnelle, sa magie étant directement liée à ses émotions, lui conférant ainsi une puissance dévastatrice pour son entourage et pour elle-même.

Les deux sont en marge du monde, pour des raisons assez différentes : pour le maître carte, il ne peut réellement faire partie d’une communauté, puisque sa catégorie de magie est unique à chaque magicien, ce qui fait que chaque jeu de cartes est complètement différent d’un autre. De par ses deux atouts puissants et mortels, son jeu est également convoité par les royaumes, parce qu’il possède la seule magie capable d’arrêter les ARM, en causant la mort de leur pilote. Pour l’émotionnelle, puisque chaque sentiment est une bombe prête à exploser, elle est fuie, elle est redoutée, elle est crainte ; et, à dire vrai, peu de personnes se soucient réellement de sa survie, puisqu’elle représente avant tout une menace. Peu importe donc qu’aucun émotionnel n’ait réussi à passer le cap des trente ans, peu importe qu’ils meurent rapidement dans la solitude la plus totale : on nous fait comprendre que peu sont capables de voir ces magiciens au-delà de leurs capacités destructrices, de leur handicap. Diba est pour beaucoup une émotionnelle d’abord, une humaine peut-être ensuite.

Plus en marge de la magie, malgré son omniprésence, des enjeux politiques se dévoilent, peu à peu : on découvre la géographie de cet univers, ses acteurs, ses peuples, ses intrigues. La politique de ce monde se cristallise autour des ARM et de leur possession, mais surtout de leur utilisation. Armes de dissuasion, si une contrée venait à en posséder plus qu’une autre, elles deviendraient des armes de destruction massive, outils de manipulation et de chantage surpuissants. Tous les personnages du roman en ont conscience, à un degré plus ou moins fort ; même l’élève un peu naïve protège les cartes qu’elle a en main, et ne prend pas de décision hâtive.

Un dernier point qui m’a particulièrement touchée dans ce livre, c’est l’inclusivité tranquille, nonchalante qui s’y trouve. Personnages queers, qu’iels soient gay, lesbiennes, trans ou aromantiques, évoluent dans ce monde sans que cette caractéristique soit la seule qui les définisse, sans qu’il s’agisse là de leur seul intérêt dans l’histoire. Il en va de même avec le personnage handicapé, la directrice de l’université, qui n’est jamais décrite qu’à travers le prisme de son handicap moteur : il n’est qu’un élément de plus à sa description, sans être pour autant ce qui la définit totalement.

L’inclusivité se retrouve également dans l’écriture, avec la présence de notes de bas de page pour expliciter des termes rares (voire même inventés ? à vérifier), qui pourraient faire obstacle à la compréhension ou à la représentation de la scène.

Vous l’aurez compris par cette très longue chronique, j’ai absolument adoré ce roman, et il me tarde de pouvoir lire la suite ! Les personnages, l’univers, l’intrigue sont posés, je n’ai qu’une hâte, c’est de les voir être encore plus développés !

C’est pour moi un sans faute, tant vis-à-vis de la construction du monde dans lequel évoluent les protagonistes, qui laisse entrevoir sa complexité, sa diversité et malgré tout sa cohérence, que de son système de magie tout aussi divers et passionnant, que de l’intrigue qui nous tient en haleine tout en nous disséminant par-ci par-là des indices sur les relations intrapersonnelles, les futurs évènements, etc.

J’avais commencé par la couverture, je vais finir par elle également, parce qu’encore une fois, elle est magnifique. Mais ce n’est pas tout : si vous êtes du genre à lire un bouquin en plusieurs fois, vous vous rendrez bien vite compte que cette couverture est en fait… constituée des éléments les plus importants de l’histoire ! De même, l’intérieur du livre comporte deux visages féminins, qui sont déterminants dans l’histoire bien qu’à priori secondaires ; chaque chapitre, quant à eux, est affublé d’une petite arche avec colonne, délabrée et envahie de végétation, qui participe à l’ambiance à la fois hors du temps et tellement ancrée dans le présent de l’intrigue du roman, tout en nous donnant l’impression d’être dans les jardins interdits, peut-être le lieu dont il est le plus fait mention dans ce premier tome.

Bref, pour reprendre les mots de Nawal : lisez Mystic Flown.