Chasseurs de flamme, Hafsah Faizal

« Ma mère m’a expliqué un jour que nos âmes s’adaptent à l’obscurité, reprit-il. Comme nos yeux s’y habituent peu à peu quand il fait noir. »

Les gens vivaient parce qu’elle tuait.

Les gens mouraient parce qu’il vivait.

Zafira est la Chasseuse. Elle se déguise en homme lorsqu’elle brave la forêt maudite de l’Arz pour nourrir son peuple.

Nasir est quant à lui le prince de la Mort, assassinant ceux qui sont assez stupides pour défier son tyran de père, le sultan.

Si Zafira était démasquée et sa nature féminine exposée, tous ses actes seraient décriés. Il en va de même pour Nasir qui serait brutalement puni par son père si celui-ci découvrait la compassion dont fait preuve son fils.

Ils sont de véritables légendes dans le royaume d’Arawiya, mais aucun d’entre eux ne veut de cette gloire.

Alors que la menace d’une guerre grandit et que l’Arz étend son ombre de jour en jour, Zafira et Nasir sont envoyés chacun de leur côté récupérer un artefact perdu qui restaurerait la magie dans le royaume. Le fils du sultan est chargé d’une mission supplémentaire : éliminer la Chasseuse.

Mais au cours de leurs voyages respectifs, un autre mal terrifiant semble émerger et l’objet qu’ils recherchent pourrait s’avérer plus dangereux qu’ils ne l’imaginent.


Ce livre me tentait depuis un bon moment déjà. Je n’en ai entendu que du bien, c’était LA Fantasy sur le monde arabe à lire. Mais l’occasion ne s’est jamais présenté pour moi. Après ma lecture de Sirem et l’oiseau maudit (il FAUT lire ce livre), j’ai eu envie de continuer à me plonger dans des univers de Fantasy inspiré par ma culture d’origine et c’est donc tout naturellement que je me suis tournée vers le premier tome des Sables d’Arawiya.

Il faut malheureusement avouer que ce fut une lecture mitigée pour moi. Il y a eu de nombreux points forts dans ce roman dont j’ai apprécié la globalité mais certaines choses m’ont quand même assez dérangé dans ma lecture, la rendant un peu longue et fastidieuse par moments.

Commençons par les points positifs. Parce que oui, j’ai globalement aimé ma lecture, principalement grâce à l’ambiance orientale qui s’en dégage et l’inspiration claire du jeu Assassin’s Creed. J’ai beaucoup aimé voir de l’arabe se glisser dans la narration, même si la phonétique en français nécessite une gymnastique mentale qui est parfois un peu énergivore. J’ai aussi été agréablement surprise de voir des créatures fantastiques des mythes du Moyen-Orient, qui ne sont pas des djinns. Cela nous change un peu et offre une originalité bienvenue. L’univers est bien construit, on visualise plutôt bien Arawiya avec ses califats et les spécificités de chacun.

Les personnages sont attachants. J’ai beaucoup aimé Deen (dont j’adore le prénom) pour sa douceur, sa loyauté sans failles et son respect qu’il porte aux autres et particulièrement à Zafira. J’ai également apprécié cette dernière, son courage mais aussi sa vulnérabilité non cachée. Altaïr, dont le prénom me rappelle un certain assassin connu et qui apporte de l’humour et une certaine lumière à cet univers qui s’assombrit de page en page. Malheureusement, je trouve que la plupart des agissements des personnages n’ont pas trop de sens ou s’embourbent dans des clichés, ce qui m’a un peu dérangé dans ma lecture. J’avoue avoir lever les yeux au ciel quelques fois, notamment sur cette manie qu’ont les personnages à savoir précisément, presque au mot près, ce que pense Zafira en regardant son visage. Alors oui, on peut être un livre ouvert m’enfin bon, il y a des limites.

Les agissements des personnages manquent parfois de cohérence, mais ce qui pêche le plus pour moi, c’est la narration. J’ai eu parfois du mal avec le style de l’autrice, je trouve que certains effets tombent à plat. C’est possiblement un effet de la traduction, je ne saurais dire, mais en français en tout cas, ça n’a pas un bel effet. Je trouve que cela manque aussi de subtilité. La condition des femmes dans le califat de Demenhune est abordée avec de gros sabots, de même que les traumatismes de Nasir, ce qui réduit tout l’impact dans la lecture. Et puis l’intrigue est vraiment confuse. Je me suis perdue de nombreuses fois quand cela devait être clair et j’ai vu des révélations censées surprendre à trois kilomètres à la ronde et qui retombent donc comme un soufflet. C’est vraiment dommage parce que le roman possède un vrai potentiel mais malheureusement, la construction du récit m’a fait rater le rendez-vous avec le coup de cœur.

C’est donc une lecture globalement intéressante et rafraîchissante mais dont je suis un peu passée à côté à cause de la narration. Je conseille tout de même de tenter l’expérience car je suis certaine qu’il continuera à trouver son public.

Les Héritiers de Brisaine, tome 5 : Le Cœur de toutes les légendes, David Bry

Les meilleurs amis de Fabula.
Et les héritiers de Brisaine.

Le dernier tome de la série à succès de David Bry, coup de cœur des Imaginales, qui signe sa première série jeunesse.
L’heure de la dernière bataille a sonné. Pour sauver la magie de Fabula, les héritiers de Brisaine doivent absolument retrouver le Cœur de toutes les légendes. D’après la Sorcière des saisons, il serait caché au sein même du château de Trois-Dragons ! Mais, de son côté, le maître du Clair-Obscur a lui aussi rassemblé toutes ses forces. Dans le plus grand secret, il a élaboré un plan terrible !
Les cinq amis réussiront-ils à déjouer les pièges de l’archimage et la menace des dragons ?


Ca y est, nous y sommes, le tome ultime, la fin d’une aventure merveilleuse aux côtés d’Eguerrand, Aliénor et Grégoire. Quelle joie de les avoir connus et quelle tristesse de les quitter !

Encore une fois, c’est un tome très court mais riche en rebondissements qui nous embarque dans le dernier combat de ce trio pour rétablir la magie dans leur monde. J’ai été immergé dans cet univers enchanté où l’amitié, la compassion et l’amour prennent le dessus sur la cupidité, l’ambition et la méchanceté.

De belles valeurs sont transmises à travers des personnages attendrissants qui m’ont inspiré malgré leur très jeune âge. J’admire le courage d’Enguerrand, Aliénor et Grégoire, leur amitié et leur bienveillance.

C’est donc un dernier tome qui clôture une très belle série que je prendrais plaisir à relire !

Galatée, Madeline Miller

Jadis, j’étais en pierre. 

Depuis l’Antiquité, le mythe de Pygmalion et Galatée n’a de cesse de fasciner et d’inspirer des artistes. Mais ce récit millénaire du sculpteur misanthrope, épris de la statue qu’il vient de réaliser, demeure inachevé : lorsque Galatée est transformée en être vivant par les dieux, elle est réduite au silence par les hommes.
Enfin, il est temps pour elle de devenir la narratrice de sa propre histoire et ainsi de choisir elle-même son destin.


J’ai été séduite par les écrits de Madeline Miller au sujet de la mythologie. Je suis tombée sous le charme du Chant d’Achille et de Circé. C’est donc avec beaucoup d’impatience que je me suis lancée dans la petite nouvelle qu’est Galatée.

C’est une lecture qui m’a décontenancé. Je ne m’attendais pas à ce style de narration qui m’a un peu perturbé. Je m’étais attendue à cette ambiance mythologique, antique et poétique à laquelle l’autrice nous a habitués avec ses deux précédents romans. Or, ici, c’est un style très actuel, moderne, parfois un peu vulgaire.

En revanche, je salue le talent de Madeline Miller pour créer une personnalité aussi propre et singulière à ses personnages. Galatée est unique en son genre. Elle possède un côté très rude, on peut même dire insensible et une certaine dangerosité qui se dégage de Galatée et qui renvoie à son statut de pierre. Cela en fait une revisite du mythe d’un point de vue féminin et féministe très intéressante et rafraîchissante.

Néanmoins, je ne saurais dire si j’ai réellement aimé ma lecture ou non. C’est une lecture très déstabilisante qui m’a laissé un sentiment ambigu.

La Dernière Vestale, Fabien Clavel

La flamme que veulent dérober les Hirpi Sorani aujourd’hui, c’est toi…

Au retour d’un voyage scolaire, Livia découvre sa maison incendiée. Pire : ses parents ont été enlevés !
Au milieu des ruines, un petit bonhomme de cinquante centimètres, Lars, prétend être une divinité du foyer. De son foyer. Il lui apprend qu’elle est la dernière Vestale de Rome, la gardienne de la flamme sacrée, et qu’elle est poursuivie par une secte antique de prêtres loups-garous !
Ça fait beaucoup à digérer, non ?
D’autant que, à entendre les grattements furieux contre la porte, ses adversaires sont déjà de retour…

Rendez-vous avec les dieux romains, poursuites dans les égouts, invocations d’esprits des défunts… la quête de Livia pour retrouver ses parents ne sera pas de tout repos !


Vous êtes habitués maintenant, vous savez que j’aime les romans, notamment jeunesse, de Fabien Clavel. Surtout quand ils parlent mythologie ! Cette fois, La Dernière Vestale nous plonge au cœur de la civilisation romaine. On embarque ?

C’était une lecture très fun !

Voilà, tout est dit. Les personnages ? Fun. L’histoire ? Fun. L’univers antique ? Double fun!

Ce petit livre m’a accompagné tout au long d’une journée à la bibliothèque et a adouci mon programme chargé avec son ambiance légère et son rythme effréné, qui a fait d’une intrigue assez classique, une très sympathique histoire.

On apprend tout plein de choses sur la civilisation romaine, qui a tendance à être éclipsée par la Grèce antique. On parle de divinités assez peu connues, notamment les Lares et les Pénates, qui permettent d’appréhender la diversité et le vaste monde de la Rome antique.

Les personnages sont attachants, j’ai beaucoup aimé le caractère bien trempé de Livia, avec sa personnalité très boudeuse, qui ajoute beaucoup à l’humour du livre. Lars est très drôle également, c’est un roman qui m’a beaucoup fait sourire. Et puis on retrouve le petit Hugo, héros de la saga Panique dans la mythologie, que j’apprécie tout particulièrement.

Je recommande si vous voulez passer un super moment !

L’Odyssée de Milo, Maxime Gillio

Une aventure bourrée d’humour que vous ne pourrez plus quitter ! Depuis la mort de son oncle, Milo se renferme sur lui, au grand désespoir d’Asha, sa meilleure amie. Mais tout change lors d’une visite au musée, quand une bague gravée de quatre étranges symboles attire son attention. Après l’avoir enfilée, impossible de l’enlever ! Plus intrigant encore, dès que Milo fait pivoter l’anneau, il devient… Achille, le célèbre héros grec ! Il apprend alors qu’il est désormais un Gardien : son rôle est de protéger le monde des humains et de renvoyer les monstres de la mythologie dans celui des dieux. Et justement, il semblerait que l’un d’eux rôde dans la ville… Accompagné d’Asha, Milo se lance dans sa première mission !


En tant qu’ado ayant grandi avec les Percy Jackson, j’étais ravie de voir qu’un auteur francophone s’essayait à ce genre mêlant monde contemporain et monde antique. La comparaison s’arrête cependant là, et c’est pour le mieux : nul besoin de faire un autre Percy Jackson, et Maxime Gillio a réussi avec brio à réinterpréter ce genre !

Déjà, il n’est pas question de demi-dieux mais de simples mortels qui, grâce à un anneau magique, deviennent des avatars de divinités ou personnages héroïques de l’Antiquité. C’est un concept que j’ai trouvé très intéressant, parce qu’il permet de mettre en lumière les différents attributs et pouvoirs mais aussi les diverses spécificités des êtres que Milo peut incarner. Dès que le jeune garçon fait appel à une divinité ou un héros, il obtient en même temps son savoir, ses compétences et sa personnalité… et c’est hilarant.


Pour la dernière fois : JE. NE. L’AI. PAS. VOLÉE !
J’ai trouvé cette bague par terre, et avant de la donner à un gardien, j’ai voulu l’essayer, simplement pour rigoler. Si on te donne une bague, c’est quoi ton premier réflexe ? Tu l’essaies, sans réfléchir, non ?
– Milo à Asha


C’était franchement très drôle de voir Milo naviguer à travers les états d’esprit qu’induisaient ses transformations, paniquer sur son physique métamorphosé ; la scène de Milo/Achille au McDo est absolument mythique. Ça l’était tout autant de lire Asha composer avec les drôles d’humeurs, d’envies ou de parler de Milo.

Les deux sont vraiment attachants, et j’ai beaucoup aimé être dans la tête du garçon, qui est un ado réfléchis, drôle et sensible. Le traitement de son personnage est vraiment très intéressant : il aime les défis, il ne recule pas devant la proposition d’une aventure aussi cool que celle de devenir un gardien, et pour autant, il ne part pas la fleur à l’anneau magique. Il est d’ailleurs pas mal critique vis-à-vis de ses mentors qui ne le guident pas vraiment et il se rend compte des changements sur sa façon d’être et sa personnalité induits à la fois par la mort de son oncle, avec qui il était très proche, et à la fois par l’invocation des Anciens à travers sa bague. Il devient plus bagarreur, plus téméraire, plus sage aussi. Il se rend compte qu’il en demande beaucoup à Asha, sa meilleure amie, à qui il tient énormément. Et pour autant, il reste un ado, avec des réactions d’ado, et c’est chouette.

Asha est, justement, loin de se laisser faire par toute cette histoire rocambolesque de métamorphoses, de monstres et de divinités. Elle est pleine de ressources et est vraiment un pilier dans l’odyssée de Milo. Maxime Gillio a, à mon sens, très bien rendu justice à ce personnage, qu’il aurait été facile de laisser glisser dans le rôle du personnage secondaire à la Hermione ou, pire, à tout ceux qui sont oubliés dès que l’aventure commence. Mais il n’en est rien, et Asha une vraie bouffée d’air frais ! Elle complète bien Milo, elle est un soutient sans faille et surtout, elle est appréciée à sa juste valeur, à la fois par Milo, par ses mentors, par l’intrigue, et ça, vraiment, ça fait plaisir.

La relation entre les deux ados est bien écrite également ; ils sont amis depuis longtemps, meilleurs amis même, et ils tiennent beaucoup l’un à l’autre. Un début de romance se profile, doucement, tendrement, du côté de Milo, qui découvre ses sentiments, et c’est tellement chouette d’avoir une romance naissante adorable d’un point de vue masculin, surtout puisque ce livre est adressé à des jeunes qui peuvent commencer à avoir leurs premières amours.


*[Note de bas de page] afin de ne pas interrompre le rythme trépidant de cette scène d’action, l’auteur rappelle à ses lecteurs qu’ils ont certainement étudié l’Odyssée en classe de 6e. Sinon, un petit tour au CDI, à la bibliothèque ou sur Internet vous apprendra les nombreuses ruses d’Ulysse.


L’intrigue est agréable, un peu sur le mode d’un jeu vidéo, une des passions de Milo, avec des créatures mythologiques comme boss à chaque mission. Pour filer la métaphore vidéoludique, la quête annexe “descente aux Enfers”, rite de passage s’il en est des héros et héroïnes de l’Antiquité, est un des moment les plus forts du roman. La thématique du deuil, si difficile à traiter, l’est ici avec tendresse, je pense.

Grâce à l’enquête que Milo et Asha mènent, ils découvrent à la fois les nouveaux pouvoirs du garçon et la mythologie qu’il adorait tant, et les lecteurs avec ! J’ai beaucoup aimé la justesse des références, les notes explicatives absolument hilarantes, et Homère à la sauce moderne. En tant qu’helléniste du côte linguistique de la force, je ne remercierai jamais assez Maxime Gillio d’avoir précisé que Homère peut être vu comme un concept, parce que c’est exactement ce qu’il est, un concept, la somme de tous les rhapsodes ayant chantés leurs épopées.
(Je suis prête à me lancer dans des explications explicativement longues mais fun pour vous prouver que l’Iliade et l’Odyssée n’ont pas été écrites par un seul et même auteur).

Bref, mon petit cœur de Lettres Classiques, de linguiste ET de lectrice est comblé face à L’Odyssée de Milo, et j’ai vraiment qu’une hâte, celle de pouvoir lire la suite !
(Cette fois-ci du point de vue d’Asha, peut-être ? 👀 ← une Cassitrouille qui veut savoir si Asha est amoureuse de Milo aussi ou pas, et voir quelle est sa manière de penser, parce que la jeune fille est son personnage préféré)

La Machine, tome 2: Les fils du feu, Katia Lanero Zamora

La voix de Luca lui parvenait d’un autre monde; d’un monde où les frères n’étaient plus des frères et où les soldats mouraient dans des combats absurdes. Il tenta d’ouvrir les yeux, mais le monde avait basculé et il était trop tard pour oublier.

Après des mois de tension, la guerre civile s’est abattue sur Panîm et l’enfer se déchaîne sur ses habitants. Les troupes de la toute jeune république et celles des anarchistes de La Machine tentent de résister à l’armée des royalistes mieux financée et mieux équipée. Dans ce tourbillon sanglant, la famille des Cabayol a littéralement explosé. Les deux frères, Andrés et Vian sont dans des camps opposés. Un face à face mortel malgré l’amour qui les unit.


Sitôt le premier tome achevé, j’ai dans la foulée débuté le second. Impossible, après la fin, de quitter cet univers, cette histoire, ces personnages pour autre chose alors que la suite se tenait dans ma bibliothèque. Encore merci ActuSF de m’avoir envoyé les deux car l’attente aurait été insoutenable.

Deux ans sont passés depuis la fin du premier tome. La guerre fait rage, Fléchistes contre Machinistes, Vian contre Andrès. Quel crève-cœur de les voir dans des camps opposés ! Bien sûr, l’un se persuade que son frère est mort et l’autre est convaincu que le premier est déserteur, mais chacun œuvre donc l’un contre l’autre sans réellement le savoir et c’est un vrai supplice à voir.

Si le premier opus avait tendance à faire plus de place à Andrès, c’est ici Vian, totalement traumatisé, qui prend peu à peu le pas sur son frère. Alternant encore une fois entre présent et passé, on découvre ses traumatismes, ses combats intérieurs aussi bien anciens que récents. C’est un personnage qui m’a profondément touché par sa détresse et son désespoir de protéger sa famille, tout en accumulant les mauvais choix. Combien de fois ai-je eu envie de le secouer comme un prunier pour qu’il aille rejoindre son frère ! Mais non, à la place, il monte les échelons de l’armée, s’embourbant de plus en plus à mesure que sa santé mentale part en vrille.

Quant à Andrès, l’idéaliste, le protecteur, l’adorable Andrès, il découvre certains mauvais aspects de son idéologie machiniste. J’ai apprécié le voir sortir de sa naïveté et permettre alors une nuance entre les deux camps. Nuance qui était certes présente dans le premier tome avec notamment les Vieux Loups, les plus radicaux du parti machiniste, mais là vécu de l’intérieur, à travers un personnage apprécié et respecté, ce que j’ai trouvé très judicieux. J’aurais également apprécié un peu plus de nuances du côté des Fléchistes, même si nous avons Vian et ses compagnons d’armes.

La tension s’installe donc au sein du pays et monte crescendo en fonction du terrain gagné par tel ou tel parti, qui crée une urgence pour le lecteur de savoir comment se dénouera ce conflit sanglant. Personne n’est épargné, personne n’est à l’abri d’une blessure, d’un traumatisme, d’une mort. Et nous, lecteurs, nous souffrons avec eux, envahis par la tension et l’angoisse de voir nos personnages préférés souffrir et priant pour qu’ils s’en sortent.

Mais comme tout bon livre fondé sur le pathos, tous ne s’en sortent pas. Ce roman m’a donc bien sûr arraché des larmes, dévastée par la mort de certains personnages. Je suis passée par toutes sortes d’émotions en ces quelques heures qu’il m’a fallut pour dévorer ce roman.

Alors pour finir, j’aimerais remercier Katia Lanero Kamora pour cette incroyable histoire qu’elle m’a offerte et qui m’a fait vibrer comme rarement j’ai pu vibrer ces derniers temps. La Machine est indéniablement l’une de mes meilleures lectures de l’année.

La Machine, Katia Lanero Zamora

Une utopie, c’est fragile. Plus on s’en approche, plus il faut être prudent.

Nés dans le confort de la famille noble des Cabayol, Vian et Andrès sont deux frères inséparables. Mais dans un pays où la révolution gronde et où les anciens royalistes fourbissent leurs armes pour renverser la toute jeune République, ils vont devoir choisir leur camp…


Mais quelle lecture ! Quel coup de cœur ! Je ressors tout juste de cette incroyable expérience dans laquelle je me suis plongée avec délice.

Par où commencer ? Les personnages. Mon dieu les personnages de ce roman. Incroyablement humains, chaleureux, captivants. Dès le début, Andrès et son frère Vian se sont logés dans mon petit cœur de lectrice, l’un grâce à sa passion, l’autre grâce à sa douceur. Et surtout, grâce à leur amour inconditionnel qu’ils se vouent. Ils sont d’un charme fou, on ne peut que les aimer et les comprendre, on veut les suivre.

On plonge donc avec eux au cœur d’un pays en tension, d’une colère qui monte entre l’élite et le peuple qui souffre. Univers de Fantasy à l’accent espagnol, notre récit prend place dans une période historique réelle de l’Espagne. Je ne m’y connais pas du tout, donc je n’ai pas d’avis particulier à donner à ce sujet, mais je me suis sentie baignée dans une chaleureuse culture qui subit un changement politique primordial : le Roi a fui le pays, la République s’installe. Mais cela ne suffit pas. L’élite n’en démord pas, refusant de laisser la place au reste du peuple qui meurt de faim.

Cette thématique est abordée à travers la cellule familiale des Cabayol, famille d’Ongles Sales qui a su s’élever sur l’échelle sociale. Néanmoins, cela n’empêche pas Andrès de revendiquer ses origines populaires, s’engageant dans la Machine, cette idéologie politique qui représente la République. A contrario, Vian s’efforce de remplir les attentes de son père, s’engageant dans l’armée afin de rendre fière sa famille et d’être digne de son rang. Chacun des deux s’affronte et s’épaule à la fois, créant une dynamique qui rythme le roman.

Mais les frères ne sont pas seuls. Ils sont entourés d’Augustina, leur gouvernante sévère mais aimante et loyale, de Léa, le grand amour d’Andrès mais surtout une révolutionnaire accrochée à ses principes et ses valeurs, qu’elle n’hésite pas à cracher à la figure de l’élite. Olympia, jeune femme torera, qui aurait pu faire belle carrière mais qui doit y renoncer pour son “devoir de femme de bonne famille”. Amaia Magister, enfin, Première Machiniste et figure d’inspiration d’Andrès.

Je pense que je pourrais discourir encore longtemps sur ce roman que j’ai dévoré en quelques jours, de manière tout à fait décousu mais avec toujours autant de plaisir et de ferveur, mais cela ne serait pas très pertinent. A la place, une dernière parole : Sang et Sueur !

Ici et seulement ici, Christelle Dabos

Ici ne ressemble à nulle part. Ici n’obéit qu’à ses propres règles. Ici il y a des Bas, des Hauts, des pairs et des impairs. Et quoi qu’il arrive tout le monde passe par Ici.

Par-dessous la peinture, le plâtre et le ciment, à l’intérieur des murs, au fond de l’invisible, je perçois quelque chose que j’arrive pas encore à nommer, quelque chose de foutrement féroce qui habite le bâtiment tout entier et qui me rentre dans les os. Qui fera bientôt partie de moi.
Ici ne ressemble à nulle part.
Ici n’obéit qu’à ses propres règles.
Ici, il y a des Bas, des Hauts, des pairs et des impairs.
Et quoi qu’il arrive, tout le monde passe par Ici.


Wow. Je suis soufflée. J’attendais ce roman avec autant d’impatience que d’appréhension. Impatience parce que c’est Christelle Dabos et que je suis tombée amoureuse de la Passe-Miroir dès les premières pages. Appréhension parce que je savais que ce livre n’avait rien à voir avec la Passe-Miroir. Et bien laissez-moi vous dire que : Wow. C’était génial.

Ici c’est le collège de Pierre, de Guy, d’Iris, de Madeleine. Ici, c’était le collège de La Remplaçante. Ici c’est mon collège. Ton collège. Ici est un huis clos qui enferme les élèves dans une mini-société régie par des règles tacites et cruelles. On est confronté à des guerres, des alliances, des traîtrises. Chacun tente de survivre à sa manière, plus ou moins facilement.

Ici et seulement ici est un roman étrange. Clairement fantastique, dans le sens que lui donne Todorov, on navigue entre réalisme et surnaturel, avec un lieu à la fois familier et étranger, qui semble prendre vie et s’enveloppe d’une atmosphère inquiétante. Il arrive tout plein de choses étranges aux élèves : l’une devient invisible, l’un fantôme, l’autre prêtresse d’une entité… Et pourtant, ce sont des élèves. Ils vont en cours, ont des devoirs, des heures de colle. Ca s’amourache, ça se jalouse, ça s’engueule, ça se réconcilie… Ce sont des gosses, paumés, mal dans leur peau, avides de sécurité et d’amour.

Ce roman a touché des cordes sensibles en moi. La première, celle de la future professeure que j’aspire à devenir. Voir cette souffrance partagée de jeunes adolescents, cette impuissance des professeurs face à cela, a quelque chose de cynique, de dur à accepter et pourtant criant de réalisme. La seconde, celle de l’ancienne élève de collège. J’ai eu, comme beaucoup je pense, des années de collège difficiles et ce roman a réveillé d’anciens souvenirs.

Et ce qui a permis une telle magie de s’opérer, c’est la plume de l’autrice, cette plume ingénieuse qui ne cesse de se renouveler. Encore une fois, Christelle Dabos nous prouve son talent pour manier les mots et les phrases. Reproduisant à la perfection le phrasé des jeunes collégiens, les fautes de syntaxe et les expressions détournées nous agressent et crient toute la peur et tout le mal-être de ces jeunes que l’on suit à travers cette année scolaire. Certaines expressions reviennent sans cesse, tel un refrain à ce cycle infernal que semblent être les années collège et dans lequel les personnages s’enlisent inlassablement.

Vous en dire plus serait vous ôté une partie du mystère qu’est ce roman si unique en son genre. Je vais donc vous laissez sur cette dernière parole : Wow. Merci Christelle Dabos.

Three Dark Crowns, tome 2 : One Dark Throne, Kendare Blake

L’affrontement pour la couronne a débuté et les événements inoubliables de la Révélation ont laissé leur marque dans l’esprit des trois soeurs. Katharine, autrefois cette faible et frêle reine, est devenue étonnamment forte. Arsinoé a découvert un secret lié à son don qui pourrait la conduire à son salut ou à sa perte. Enfin, la puissante Mirabella, pensant qu’Arsinoé l’a trahie, est fin prête à en découdre.

En pleine année de l’Ascension, les triplées vont devoir faire face à des attaques qui les pousseront à remettre leurs destins et leur progression vers le trône en question. Leurs amis tout comme leurs ennemis leur forcent la main, les menant à une issue bouleversante qui changera à jamais tous les protagonistes impliqués.


Bpocalypse, Ariel Holzl

Décidément, les adolescents étaient plus mystérieux que les mutants…

Pour se rendre au lycée, Samsara n’oublie jamais sa batte de baseball, ses talismans et son couteau de chasse. Tout ce dont elle a besoin pour affronter les animaux mutants, fantômes et autres créatures qui ont envahi les rues de Concordia après l’Apocalypse. Aujourd’hui, la ville vient de lever la quarantaine de l’ancien parc public et s’apprête à accueillir ses habitants, réputés avoir muté. Les deux jumeaux que Sam voit débarquer dans sa classe sont loin d’avoir un physique standard. Très vite, ceux qui se moquent d’eux ou les prennent à partie sont les victimes d’incidents inexpliqués. Tout semble accuser les nouveaux venus. Mais dans une ville comme Concordia, peut-on se fier aux apparences ?


Encore et toujours, c’est sans appréhension que je me plonge dans un roman d’Ariel Holzl. Après avoir adoré l’univers burtonnien de sa fantasy urbaine Les Soeurs Carmines, m’être plongé dans sa fantasy jeunesse rocambolesque qu’est Fingus Malister, puis sa dark fantasy La Princesse sans visage, me voilà plongée dans son roman post-apo jeunesse. Et ça dépote !

J’admire sincèrement la capacité de l’auteur à changer de style en fonction de ses romans. Et surtout, j’admire le fait que ce soit toujours une plume agréable, dynamique et inventive. Ici, elle correspond parfaitement au caractère sarcastique et revêche de Samsara, jeune fille rebelle qui préfère taper sur du mutant que de se casser la tête sur des maths (je la comprends).

L’atmosphère instaure un sentiment de fin du monde digne de la série The Last of Us, où le danger rôde à chaque coin de rue. Mais cela n’empêche pas les habitants de Concordia de vivre. Et surtout, cela n’empêche pas les problématiques sociales, aussi vieilles que le monde, de continuer à sévir : lutte des classes, racisme… L’auteur aborde ici plusieurs thématiques de manière très réalistes et intéressantes. J’ai beaucoup aimé le regard tout d’abord erroné puis éclairé de Sam, qui évolue au fil du roman, grâce notamment à l’aide d’Yvette et de Danny, ses deux meilleurs amis. Yvette est un personnage très drôle et intelligente, qui apporte de l’humour et une certaine fraîcheur à Concordia. Danny, un peu plus discret et en retrait, n’en reste pas moins un bon ami loyal et attachant

Dans une sorte de huis clos à l’échelle d’une ville, la société s’est reconstruite sur de nouvelles bases et de nouvelles règles. J’ai été très amusée par le fait que la nouvelle monnaie devient le CD ! Exemple, encore une fois, de l’inventivité de l’auteur. Par ailleurs, les différentes références à la culture populaire et les vibes à la Supernatural m’ont beaucoup plu.

Donc, encore et toujours, je vous recommande les romans d’Ariel Holzl, auteur qui sait se renouveler et nous offrir de belles histoires à chaque fois !