À La Pointe de l’Épée, Ellen Kushner

« Richard savait qu’il se bâtait pour sa vie, et il était terriblement heureux. »

Richard Saint-Vière est le plus fameux des tueurs des Bords-d’Eau, le quartier des pickpockets et des prostituées. Aussi brillant qu’impitoyable, violent à ses heures, ce dandy scandaleux gagne sa vie comme mercenaire en vendant ses talents de bretteur au plus offrant, sans trop se soucier de morale. Mais tout va se compliquer lorsque, pour de mystérieuses raisons, certains nobles de la Cité décident de se disputer ses services exclusifs ; Saint-Vière va dès lors se retrouver au cœur d’un inextricable dédale d’intrigues politiques et romanesques qui pourraient bien finir par lui coûter la vie… Au-delà du roman d’aventures mâtiné de mélodrame, au-delà de l’hommage savoureux rendu à Dumas et aux grands récits de cape et d’épée, À la pointe de l’épée est une œuvre forte, profondément dérangeante, sur la nature de la réalité et la moralité de la violence. Une inoubliable galerie de personnages plus grands que nature, désespérés au point de tout risquer.

Les Éditions ActuSF promettent avec À la Pointé de l’épée un roman de cape et d’épée et ont tenu parole. Cette sublime édition hardback collector renferme des nouvelles en plus du roman principal autour du personnage de Richard Saint-Vière, meilleur duelliste de Bords-d’Eaux.

Ce roman est, je crois, la première histoire de cape et d’épée que je lis. J’ai beaucoup aimé les premières nouvelles, qui retracent l’enfance et le début de carrière de Saint-Vière en tant que bretteur. Le style est très prenant, plein d’humour et agréable à lire, on se laisse porter par le récit et l’ambiance. Le roman débute sur la même dynamique et j’ai pris beaucoup de plaisir à lire la première moitié où l’on découvre l’univers et les personnages, que je trouve très bien développés et diversifiés. Le duo principal, Saint-Vière et Alec, m’a fait penser à Seregil et Alec de Nightrunner (le nom d’Alec n’y est pas pour rien je crois…). Leur relation est intéressante à suivre et Alec est un personnage particulièrement complexe auquel je me suis beaucoup attaché. C’est un jeune homme très torturé aux pulsions suicidaires qui donne lieu à des scènes très intenses que l’autrice retranscrit parfaitement. J’ai vraiment été fasciné par ce personnage. Quant à Saint-Vière, il m’a surtout fait penser à Geralt du Sorceleur dans sa manière d’être impassible et sombre. Les autres personnages sont également très intéressants. J’ai beaucoup aimé la mère de Saint-Vière, Octavia, qui se trouve être une femme de savoir et qui mène sa vie telle qu’elle l’entend. Michael est aussi intéressant dans sa manière de se remettre en question ainsi que sa société.

L’univers est également bien développé, tout en subtilité. J’ai beaucoup aimé la différence entre le quartier riche et pauvre de la ville de Bords-d’Eaux qui semblent être deux mondes totalement différents, qui ne se comprennent pas trop et qui vivent chacun de leur côté.

Malheureusement, arrivé au milieu du roman, mon enjouement pour l’histoire a commencé à décroître. J’ai eu du mal à continuer ma lecture, étant un peu perdu dans les différentes intrigues politiques et la manière dont elles s’entremêlent. Je n’ai pas tout de suite compris les enjeux de ce qui se passait et cela m’a un peu gâché ma lecture. Ellen Kushner joue beaucoup sur les sous-entendus et les non-dits, mais peut-être un peu trop pour une intrigue aussi complexe. Heureusement, le brouillard se dissipe sur la fin et fait la lumière sur les événements passés. Le rythme s’accélère et la tension est palpable. Mon attention a été de nouveau captivée et ce jusqu’à la fin. Fin que j’ai trouvée très poétique et symbolique.

Pour conclure, ce fut une lecture un peu mitigée avec un début très enthousiaste, un milieu où l’enjouement est retombé mais qui se rattrape bien sur la fin. Les personnages sont complexes et bien développés, comme je les aime et la plume pleine d’humour et de poésie d’Ellen Kushner a fini par me convaincre.

#Intrigue #diversité #Politique #ActuSF

Engrenages et Sortilèges, Adrien Tomas

« Le respect qu’on les autres pour toi ne sera jamais aussi important que celui que tu éprouves pour toi même.

Grise et Cyrus sont élèves à la prestigieuse Académie des Sciences Occultes et Mécaniques de Celumbre. Une nuit, l’apprentie mécanicienne et le jeune mage échappent de justesse à un enlèvement. Alors qu’ils se détestent, ils doivent fuir ensemble et chercher refuge dans les Rets, sinistre quartier aux mains des voleurs et des assassins. S’ils veulent survivre, les deux adolescents n’ont d’autre choix que de faire alliance…

La première chose qui m’a attiré dans ce roman, en dehors de sa sublime couverture, a été le titre, ou plutôt ce qu’il promettait. Cette idée de mêler la technologie et la magie qui laisse présager un univers de fantasy steampunk m’a tout de suite plu. J’ai donc commencé ma lecture avec une curiosité enthousiaste.

On plonge dans cette histoire en suivant deux personnages : Grise et Cyrus. À eux deux, ils représentent la rivalité qu’entretiennent les mages et les mécaniciens. Ayant chacun un caractère bien trempé, ce qui crée des tensions mais aussi plusieurs scènes assez comiques, on s’attache assez facilement à eux. J’ai beaucoup aimé les suivre dans leur folle aventure parmi les rebelles de la société. Le duo possède une bonne dynamique et ne tombe pas dans une romance cliché, ce qui fait du bien ! J’ai surtout beaucoup aimé leur ouverture progressive d’esprit, remettant en cause tout ce qui constituait leur monde, leurs valeurs… L’auteur a réussi à faire porter de belles valeurs à son roman : la diversité, l’estime et le respect de soi et d’autrui, la tolérance… Les messages sont tous très beaux et percutants qui ont résonné en moi.

Les autres personnages sont également intéressants, même si parfois un peu stéréotypé. Mais pour une fois, cela ne m’a pas dérangé outre mesure. Petite mention spéciale pour le familier de Cyrus, le chat Quint, qui m’a vraiment bien fait rire !

C’est une histoire au scénario assez classique mais tout de même très plaisante à lire. Certaines intrigues sont prévisibles mais je n’ai pas trouvé cela gênant. La construction de l’univers arrive à gommer le côté ennuyant de la prévisibilité par son originalité. J’ai beaucoup aimé la manière dont la technologie et la magie sont mêlés. J’ai tout de même eu une petite préférence pour le côté engrenage que sortilège. Grise n’est pas une fille comme les autres, ce qui apporte un peu de fraîcheur à ce roman jeunesse/ adoet sa passion pour la mécanique est contagieuse.

Pour conclure, ce fut un roman steampunk très agréable à lire que je conseille à toute personne qui veut passer un bon moment dans un univers Fantasy/ steampunk jeunesse.

#disparition #diversité #revanche #révolte #magie #Politique #Intrigue #résistance #Rageot

Passing Strange, Ellen Klages

« – Les risques du métier de professeur.
– J’aimerais bien. Je ne suis que maître de conférences. Il semblerait que mon doctorat en mathématiques compte moins que mes ovaires. »

San Francisco, 1940. Six femmes, avocate, artiste ou scientifique, choisissent d’assumer librement leurs vies et leur homosexualité dans une société dominée par les hommes. Elles essayent de faire plier la ville des brumes par la force de leurs désirs… ou par celle de l’ori-kami. Mais en science comme en magie, il y a toujours un prix à payer quand la réalité reprend ses droits.

Roman sociétal autant que fantastique, Passing Strange est complété par la nouvelle Caligo Lane qui nous dévoile un peu plus les mystères de l’ori-kami.

C’est le speech de ce roman qui a tout de suite attiré mon attention. Une histoire de femmes dans un San Francisco des années 40, cela m’a beaucoup intrigué. Il y a quelques jours, bloquée dans le deuxième tome du Seigneur des Anneaux, j’avais besoin d’une petite lecture qui sorte du genre et c’est sur ce roman que mon attention s’est portée. Je l’ai donc sorti de ma bibliothèque et j’ai passé l’après-midi entière à le lire.

J’ai tout d’abord été surprise par la structure du roman. Il est séparé en ce que j’appellerais des nouvelles plutôt que des parties qui forment tout même une cohérence dans la narration, qui ne sont pas détachées les unes des autres.

On commence par le point de vue d’Helen Young, sur la fin de sa vie. Tout est un peu flou, on a du mal à comprendre la signification de ces actes et cela nous pousse à continuer la lecture. Puis débute réellement l’histoire en 1940 où l’on rencontre les personnages principaux, pour ensuite revenir sur le « présent ». Si au début, c’était surprenant, on finit par comprendre le choix de l’autrice qui s’avère très astucieux et que j’ai personnellement beaucoup aimé.

Durant cette fameuse histoire principale, on rencontre Haskel et Émilie qui tombent chacune sous le charme de l’autre. J’ai beaucoup aimé ces deux personnages, notamment Haskel. Ce sont des femmes qui n’entrent pas dans les clichés de lesbiennes qu’on a l’habitude de voir dans la littérature ou au cinéma et cela fait plaisir. Leur histoire est peut-être un peu rapide pour moi mais elle se fait de manière tellement naturelle, tellement évidente que je n’ai pas été plus dérangée que cela par ce défaut, hormis sur la fin. C’est donc un beau mélange de naturel et d’extraordinaire, de marginal que l’autrice a réussi à créer. J’ai également apprécié les autres personnages, que je trouve très bien travaillé. Elles n’ont rien de véritablement spéciales, ce sont des femmes ordinaires, certaines scientifiques, d’autres artistes. Mais elles ont la particularité d’être douées dans leur domaine. Elles sont intelligentes, passionnées, indépendantes, dans une époque où le rôle d’une femme se cantonne à celui d’épouse et de mère. À cela s’ajoute leur orientation sexuelle qui les pousse à devoir se cacher. L’oppression, le jugement qu’elles subissent est affligeant et fait malheureusement écho à notre société actuelle par certains aspects.

L’ambiance, l’atmosphère que dégage cette histoire m’a beaucoup plu. C’est un mélange d’ordinaire et de mystique, dans une ville connue pour son côté magique. Ce fut un beau voyage qui me rappela beaucoup la série Charmed dans une certaine mesure.

Ce fut donc une très belle et intéressante lecture qui présente des personnages féminins évoluant dans une société où elles ne sont pas les bienvenues. Cette lecture pousse à la réflexion de l’image et la place d’une femme dans la société, à la différence entre ce qu’elle veut être et ce qu’elle doit être. C’est donc une lecture captivante que je recommande, autant aux femmes qu’aux hommes.

#ActuSF #diversité #harcèlement #résistance #amour #magie

La Passe-Miroir, La Mémoire de Babel, Christelle Dabos

« Il sera une fois, dans pas si longtemps, un monde qui vivra enfin en paix.

En ce temps-là, il y aura de nouveaux hommes et il y aura de nouvelles femmes.

Ce sera l’ère des miracles. »

Deux ans et sept mois qu’Ophélie se morfond sur son arche d’Anima. Aujourd’hui il lui faut agir, exploiter ce qu’elle a appris à la lecture du Livre de Farouk et les bribes d’informations divulguées par Dieu. Sous une fausse identité, Ophélie rejoint Babel, arche cosmopolite et joyau de modernité. Ses talents de liseuse suffiront-ils à déjouer les pièges d’adversaires toujours plus redoutables ? A-t-elle la moindre chance de retrouver la trace de Thorn ?

Me revoilà donc comme promis pour vous parler du troisième tome de la Passe-Miroir. Ma relecture était censée durer jusqu’à la sortie du quatrième et dernier tome (J-8 à l’heure où je vous parle !!) mais j’ai été tellement emporté par les aventures d’Ophélie que je l’ai finalement dévoré en l’espace de trois jours. Il m’a fallu ensuite trois autres jours pour me remettre de mes émotions et me voici donc pour vous en parler !

Ophélie, un personnage qui se découvre

« Elle se sentit mourir. Elle allait enfin pouvoir vivre »

Si dans les deux premiers tomes j’ai admiré Ophélie pour son courage et sa détermination, ce n’était finalement rien comparé à ce tome-ci. Mon amour pour ce personnage ne cesse de grandir avec le temps et les tomes. On la retrouve donc coincée sur Anima, totalement désœuvrée et ne sachant pas quoi faire jusqu’au moment où Archibald l’aide à s’en échapper. La voici ensuite partie pour Babel toute seule, à la recherche de Thorn. Dans ce tome, elle est totalement livrée à elle-même. Elle est seule dans une arche qu’elle ne connaît pas et qui s’avère totalement différente d’Anima et du Pôle. Mais elle ne baisse pas les bras et continue sa quête.

Elle a eu beau subir des intimidations, des menaces de mort et j’en passe, au Pôle, ce n’est rien comparé à l’ébranlement qu’elle subit en entrant à la Bonne Famille. Durant son séjour à Babel, c’est son identité et ses compétences qui sont remises en question. Tout ce dont elle était certaine se voit ébranler, elle ne sait plus où elle en est, elle ne sait plus ce qui la définit, qui elle est. Elle traverse une réelle et douloureuse crise d’identité qui n’a fait que me rapprocher un peu plus de ce personnage. Mais encore une fois, Ophélie nous surprend en apprenant à nouveau à se regarder dans le miroir et accepter tout ce qu’elle y voit. Mais il faut avouer que Thorn ne lui facilite pas la tâche…

« Votre propension à malmener les statistiques est effrayante. »

Thorn, un personnage qui ébranle toutes les certitudes

« Je suis exigeant, rabat-joie, maniaque, asocial et estropié, énuméra-t-il d’une voix terrible. Vous pouvez me prêter tous les défauts du monde,mais je ne vous autorise pas à me traiter d’égoïste. « 

Thorn m’a complètement chamboulé. La première fois que j’ai lu ce tome, j’ai été tout autant déstabilisée qu’Ophélie en le retrouvant. Si dans la première partie du roman, on n’attend qu’une chose c’est de le retrouver, on ne s’attend clairement pas à ce qui arrive quand le moment vient. Son changement nous rend inquiets à son sujet, nous fait nous poser des questions, nous fait douter. La seconde partie est donc encore plus frustrante que la première car elle suscite encore plus de questions qu’on en avait au début de ce livre. Cela m’a rappelé le premier tome où je trouvais qu’on ne voyait pas assez Thorn et que ses passages étaient bien trop courts à mon goût. L’autrice à nouveau, joue avec cela et nous pousse à dévorer les pages afin de comprendre ce qui se passe.

Arrive donc les derniers chapitres du livre… Ah ces derniers chapitres ! Je retrouve mon Thorn taciturne et entêté et je retombe à nouveau profondément amoureuse de lui. Quel bonheur de le retrouver !

Babel, une nouvelle arche pleine de surprises

« La seule véritable erreur est celle qu’on ne corrige pas. »

J’ai adoré découvrir cette arche. Son fonctionnement si particulier, cet accent légèrement British que j’aime tant, cette culture un peu orientale qui rappelle l’Inde sous l’Empire britannique… C’est nouveau, original et frais ! Vraiment, ce fut un véritable plaisir d’arpenter cette arche en compagnie d’Ophélie et de découvrir de nouveaux personnages tels qu’Ambroise ou Blasius.

J’ai aussi beaucoup aimé l’univers de la Bonne Famille et du Mémorial. Cette quête constante de la connaissance qui se confronte aux problèmes de censure et de contrôle de l’information est vraiment une thématique que j’ai beaucoup aimée et qui est très bien exploitée.

J’ai également trouvé le personnage d’Hélène très intrigant. Elle est encore différente d’Artémis, de Farouk ou même de son frère jumeau, Pollux. Elle semble un peu plus alerte qu’eux et un peu plus consciente de ce qui se passe réellement dans ce monde. Sa tolérance envers les sans pouvoirs et les non-fils de Pollux m’a quelque peu rappelé Helga Poufsouffle dans Harry Potter (qui se trouve être ma maison !). J’espère qu’on la reverra dans le prochain tome.

Ce que j’ai trouvé le plus intéressant sur cette arche, c’est le fait que plusieurs civilisations sont mélangées. On retrouve des habitants de plusieurs autres arches, ce qui permet d’en apprendre plus sur l’univers que l’autrice a créé, sans avoir à voyager sur toutes les arches. C’est un choix ingénieux, qui concorde en plus très bien avec la légende de Babel. Rien n’est laissé au hasard !

« Le Mémorial de Babel, commenta Ambroise. C’est notre plus vieux monument, la moitié date de l’ancien monde. L’adage dit que toute la mémoire de l’humanité y repose. »

Une intrigue à en perdre haleine

« Raconter le passé en refusant de raconter la guerre, c’est mentir. »

Cette intrigue… Mon dieu cette intrigue ! (Oui oui, mon dieu, c’est le cas de le dire). J’ai rarement été autant dévorée par la curiosité qu’à travers ce tome. J’ai dévoré les pages à la recherche du moindre indice pour en apprendre un peu plus, pour mieux comprendre ce mystère que sont Dieu et l’origine des arches. Christelle Dabos nous mène totalement par le bout du nez, elle nous entraîne encore plus profondément dans les méandres de son univers si grandiose… C’est à en avoir le souffle coupé.

J’ai été stupéfiée par les révélations que ce tome apporte et cela a été une véritable torture de me dire la première fois qu’il allait falloir attendre pour avoir la suite… Durant ma relecture, j’ai presque eu l’impression de le lire pour la première fois tellement de petits détails importants m’ont échappé. Là encore, j’en suis ressortie encore plus époustouflée.

« Si violentes que fussent les émotions qui lui mettaient le corps en ébullition, quand arrivait le moment de les exprimer il n’en ressortait toujours qu’un pitoyable goutte-à-goutte. »

La plupart des lecteurs et lectrices trouvent ce tome un peu long et préfèrent les deux premiers. J’avoue avoir du mal à me décider sur celui que je préfère car chacun m’a ébranlé à sa manière. Mais je trouve que la longueur de ce roman fait sa force. Christelle Dabos trouve le moyen d’approfondir son univers et d’accroître notre curiosité, de développer ses personnages et de préparer la fin de cette aventure. Vraiment, je trouve qu’il n’y a rien à raccourcir, rien à accélérer. Tout est à la place qui lui est dû et tout est justifié.

C’est donc toute fébrile et en PLS que j’ai terminé ce troisième tome, bien trop tôt à mon goût au vu de la longue attente qu’il me reste pour l’ultime tome. Tome que je ne suis pas prête à accueillir non plus car il signera la fin d’une aventure que je refuse de terminer.

#disparition #quête #pouvoirs #diversité #souvenir #Mystère #ChristelleDabos

Attirance et Indécision, Simone Elkeles

« Famille. Familia. Ce mot renvoie à tellement de problème. Je détestais ce mot. Il signifie que l’on est lié à des gens, qu’on le souhaite ou non. Il signifie que l’on doit se montrer digne, même si l’on se fait taper sur les doigts ou insulter, ce qui fait encore plus mal. « 

Bagarreur et indiscipliné, Victor, un jeune latino au sang chaud, accumule les avertissements et doit sa présence au lycée à ses capacités sportives plus qu’à ses résultats scolaires.

Monika, elle, est une jeune fille de bonne famille promise à une carrière brillante.

Ce qui les rapproche ? Leurs sentiments et une attirance sincère.

Ce qui les éloigne ? Tout le reste : les conventions, leurs familles, leurs amis, leur passé…

Et Trey, le petit copain de Monika, qui est aussi le meilleur ami de Victor…

J’ai lu le premier tome il y a quelques années déjà et j’avais beaucoup aimé l’histoire entre Ashtyn et Derek. Cette fois, l’histoire se tourne vers Monika et Victor, que tout semble séparer.

Victor, un latino au grand cœur

J’ai tout de suite adoré Victor. C’est un beau latino aux airs de bad boy mais qui cache un vrai cœur d’or. S’il y a bien un mot pour le définir, ce serait la loyauté. C’est un jeune homme très fidèle aux gens qu’ils aiment et à ses principes.

Malheureusement, il manque cruellement de confiance en lui et en ses capacités. Sans cesse rabaissé par son père et vu comme un moins que rien par la plupart des gens, il a fini par adopter cette image qui lui a fait baisser son estime de soi. Pour lui, il n’est qu’un délinquant de plus, qui n’est pas assez intelligent pour espérer un avenir stable et ambitieux.

Et pourtant, c’est un sportif hors pair. Même s’il ne s’en rend pas compte, il est admiré pour ses capacités sportives, pour sa passion et sa détermination sur le terrain. Il est très aimé de son équipe et groupe d’amis. J’ai d’ailleurs moi-même eu beaucoup de plaisir à retrouver ce groupe, notamment Ashtyn et Derek que j’avais adoré dans le premier tome.

Ce qui m’a le plus plus dans ce personnage, c’est sa fidélité envers ses amis et sa famille. Il a de beaux principes et même s’il n’agit pas forcément de la bonne manière, préférant ses poings à ses mots, il reste tout de même un homme d’honneur qui ne cherche qu’à protéger ses proches. C’est un personnage qui m’a beaucoup touché. Sa culpabilité et son manque d’estime pour lui-même le rendent vulnérable et le ronge peu à peu. Il m’a bien sûr rappelé Alex Fuentes ainsi que ses frères, que j’ai d’ailleurs adoré retrouver !

Et surtout, son amour pour Monika le rend tout simplement adorable. Il culpabilise d’aimer la petite amie de son meilleur ami alors qu’il l’aimait avant même qu’ils ne soient ensemble. La jugeant intouchable, cela ne l’empêche pas d’être un très bon ami pour elle et d’aider son meilleur ami face à ses problèmes de couple.

Monika, un esprit fort dans un corps fragile

J’ai également beaucoup aimé Monika. C’est une jeune fille adorable, qui semble épanouie et qui a tout ce qu’il lui faut. Malheureusement, les apparences sont trompeuses.

En effet, Monika n’a pas une vie si parfaite que cela. Tout d’abord, c’est une jeune fille malade. Atteinte d’arthrite juvénile, tout son corps la fait souffrir sans cesse. Mais elle n’en montre rien et continue sa vie d’adolescente normale. C’est quelqu’un qui ne veut pas inspirer de pitié et qui ne veut pas attirer l’attention sur elle. J’ai trouvé ce personnage très humble ainsi que très fort. Elle ne laisse jamais rien paraître, aucune faiblesse et cherche à se dépasser quoi qu’il arrive.

C’est aussi une très bonne amie et petite amie. Elle ne se plaint jamais, elle est toujours là pour tout le monde et elle n’est pas une fille « prise de tête ». C’est quelque chose que j’ai beaucoup aimé chez elle. Elle fait passer les autres avant elle.

Malheureusement, son petit ami Trey ne la mérite pas. Il ne fait pas attention à elle, il agit par habitude et automatisme tandis qu’elle patiente en silence, avec compréhension et bienveillance. Mais cela ne suffit pas et il a fallu qu’elle se rende à l’évidence : son petit ami n’a plus de sentiments pour elle. C’est assez triste de la voir tenter d’arranger les choses, de prendre soin de lui malgré tout. Je trouve qu’elle a eu beaucoup de courage et de bienveillance, car, personnellement, ce n’est pas quelque chose dont j’aurais été capable.

Mais finalement, petit à petit, le meilleur ami de son copain attire son attention. Elle se sent tout d’abord coupable pour finalement se rendre compte qu’il n’y a pas de raisons de l’être et qu’elle aussi, elle a le droit au bonheur.

Vic et Monika, un couple teinté de culpabilité

J’ai vraiment beaucoup aimé leur couple. D’un côté, on sent que Vic aime profondément Monika depuis des années, il est doux et attentionné envers elle, protecteur et aimant et d’un autre, on sent que Monika aide Vic à se dépasser, à être meilleur, elle lui redonne de l’estime et de la confiance en soi.

C’est un couple complémentaire, chacun apportant ce dont a besoin l’autre. L’attraction qu’ils ont l’un pour l’autre est palpable et pimente l’histoire. Mais la culpabilité ainsi que les secrets ne cessent de les séparer, en formant un fossé entre eux qu’ils n’arrivent pas à traverser.

C’est une histoire assez frustrante et tragique au début, on a de la peine pour Vic, partagé entre son amour pour Monika et sa loyauté envers Trey. Dès le début, il se fait une raison, il renonce à tenter sa chance et se contenter de l’aimer de loin, en silence. Mais même quand Monika finit par se rendre compte de ses sentiments et que « la voie est libre », il n’arrive pas à lâcher prise, à ne pas la voir autrement que comme la petite amie de son meilleur ami.

Trey, le garçon parfait

Tout le monde aime et admire Trey. Mais cela n’a pas été mon cas. Dès le début, j’ai trouvé qu’il ne faisait pas assez attention à Monika, je trouvais qu’il la délaissait, ainsi que ses amis. Si le groupe est soudé et qu’ils font front commun dans l’adversité, lui n’hésite pas à les lâcher dès qu’il s’agit de réputation et de dossier scolaire. Je n’ai pas vraiment compris pourquoi Vic l’admirait autant. Je sais bien qu’il n’a pas une vie facile et que celle de son meilleur ami semble meilleure, mais finalement, je trouve que Vic a beaucoup plus de qualités que Trey. Si Trey est particulièrement intelligent, que c’est un bon sportif et qu’il a un grand avenir devant lui, il n’est pour moi, pas à la hauteur par rapport à Vic qui est lui, quelqu’un de loyal et fidèle, prêt à tout pour les gens qu’ils aiment.

Mais bien sûr, ce que convoite le plus Vic dans la vie de Trey c’est Monika. Et là encore, je trouve que c’est vraiment dommage qu’elle sorte avec Trey, qui ne cesse de la délaisser, plutôt que Vic qui l’aime profondément et qui serait prêt à lui donner tout l’amour et l’attention dont elle a besoin.

Isa, un personnage particulièrement touchant

On a déjà rencontré Isa dans la saga des Irrésistible Alchimie, en tant que meilleure amie d’Alex et copine de Paco. C’était une jeune latina faisant partie du gang des Latino Blood, une dure à cuire qui n’avait pas froid aux yeux. Mais cette fois, on lui découvre un petit côté vulnérable.

En effet, Isa, héritière du garage d’Enrique après sa mort, tente coute que coute de garder le garage ouvert pour se donner un but dans la vie. Après la mort de Paco, c’est tout ce qui lui reste, c’est la seule chose qui lui permette de garder sa vie en main, de ne pas sombrer. J’ai été très touché par son personnage, à la fois combattante et brisée.

Elle est présente pour Vic quand il perd les pédales et fait son possible pour lui faire entendre raison. D’un autre côté, elle aussi commence à perdre pied, s’étant attaché à Bernie mais refusant de s’engager avec lui par peur qu’il ne meurt lui aussi. C’est un personnage triste et tragique et je suis contente qu’elle finisse par avancer petit à petit et qu’elle tente de se débarrasser de ses peurs.

Ce que j’ai particulièrement aimé chez elle, c’est que c’est la seule à ne pas voir Monika comme un petit être fragile. Elle ne la sous-estime pas comme les autres, elle la pense assez forte et elle croit en elle.

Un univers familier

J’ai adoré le fait de retrouver l’équipe d’Ash et Derek mais surtout, de retrouver l’univers des frères Fuentes. On revoit les quartiers sud de Fairfield avec notamment le fameux garage d’Enrique, où travaille Vic mais aussi Isa, la meilleure amie d’Alex. Et puis Alex lui-même ! Cela m’a vraiment fait plaisir de le revoir dans cette histoire et de voir à quel point il a changé et à quel point Vic lui ressemble.

Une autrice qui brise les clichés

Simone Elkeles est douée pour ce qui est de briser les clichés et les stéréotypes. Même si on retrouve de nouveau l’univers latino des Fuentes ainsi donc que les thématiques que l’on retrouve dans cette série, je trouve que ce livre amène un regard encore différent sur le sujet de la diversité et des préjugés.

En effet, là encore l’autrice nous surprend en faisant de Trey, un lycéen sportif mais aussi un jeune homme qui cherche à sortir major de promo. Non seulement, c’est rare de trouver un jeune homme qui veut être major de promo mais en plus, il fait partie de l’équipe de football du lycée. C’est une facette que j’ai bien aimée de ce personnage.

Elle casse également le stéréotype du bad boy latino sans cœur en faisant de Vic, un jeune garçon amoureux de la copine de son meilleur ami. L’idée était très bien trouvée et très bien exploitée.

Le thème de la culpabilité

Je dirais que le thème principal de ce livre, est la culpabilité. En effet, Monika comme Vic se sentent coupable vis-à-vis de Trey. Chacun s’en veut pour des raisons différentes et se laissent ronger par elle, ce qui les pousse loin l’un de l’autre.

L’autrice a très bien réussi à exploiter les différentes facettes de la culpabilité et l’a fait vivre de manières différentes en fonction de ses personnages. C’est quelque chose qui m’a beaucoup plu.

Pour conclure, j’ai vraiment beaucoup aimé ce deuxième tome et j’ai adoré retrouver cet univers signé par cette autrice au grand talent.

#amour #préjugés #diversité