Himilce, Emmanuel Chastellière

— La voici donc… Elle est jolie, certes, mais je doute qu’un poète loue un jour une beauté à nulle autre pareille.
L’humeur d’Himilce vacilla sous la pique cuisante. Pire encore, sa langue ne voulut pas rester tranquille.
— Les poètes ont déjà fort à faire, mère, répliqua-t-elle. « Elle » est heureuse de ne pas leur faire tourner la tête.

218 avant J.-C.
Entre Rome et Carthage, la guerre gronde de nouveau. Le prodige militaire Hannibal Barca se tient prêt à embraser la Méditerranée. Ainsi, lorsqu’il part pour l’Italie à la tête d’une armée, il laisse derrière lui son épouse Himilce.
À peine débarquée à Carthage, la princesse ibère est immergée dans les eaux troubles de rivalités féroces, à la merci des ambitieux et des intrigants. Elle doit alors se glisser dans le costume qu’on lui a préparé : celui d’une femme dévouée à sa nouvelle patrie, la mère du futur héritier.
Dans une ville tout entière tournée vers la guerre, la jeune femme devra-t-elle suivre le chemin tracé pour elle ? Se ranger du côté des voix de la discorde ? Ou tracer sa propre route, quitte à faire naître des inimitiés, même parmi les siens ?


Un roman sur une figure féminine de l’antiquité, comment un cœur de Lettres Classiques pourrait résister me demanderez-vous ? Eh bien il ne peut pas ! Nous avons eu la chance de recevoir Himilce en Service Presse et nous remercions grandement les Éditions Argyll pour cet envoi qui nous a ravies au plus haut point.

Alors, il faut tout d’abord savoir que, lorsque j’ai lu le résumé de ce roman, je m’attendais à moult actions et rebondissements, à un rythme effréné digne des romans sur la guerre que j’ai l’habitude de lire. Sachez qu’il n’en est rien. Himilce est un roman qui prend son temps. Qui pose les choses. Qui pèse ses mots. Et cela n’a fait que me faire apprécier un peu plus cette lecture si particulière.

La singularité de ce roman, qui traite de la guerre et de la politique dans l’Antiquité, est le fait que l’auteur a trouvé le moyen de le rendre profondément intimiste. Le roman porte bien son nom, Himilce est au cœur même de cette histoire, Hannibal hantant les ombres autour d’elle. Mais il n’est qu’une ombre et elle est la lumière. Les autres personnages, connus pour la majorité des passionnés d’Antiquité, ne font que graviter autour de cette protagoniste si peu connue de l’histoire. Une protagoniste dont j’ai mis un petit moment à m’attacher, à apprécier à sa juste valeur. Pourquoi ? Eh bien parce que Himilce n’est pas un personnage ordinaire.

Himilce n’est ni belle, ni particulièrement intelligente et ne possède pas de talent particulier. C’est une femme ordinaire (du moins pour une princesse), estropiée qui plus est, qui se retrouve mariée au grand et redoutable Hannibal pour des raisons politiques. Or, la politique n’intéresse pas Himilce et la guerre, elle la méprise. Ce dont rêve Himilce, c’est de paix et de liberté. Hantée par les dieux depuis toute petite, elle ne cherche que l’apaisement de l’esprit. Mais la famille Barca ne vit qu’à travers la guerre et la politique. Les hommes au front, les femmes sur les places publiques de Carthage, ils ne reculent devant rien ni personne pour se débarrasser de la menace que représente Rome. J’ai beaucoup aimé avoir cette dichotomie entre les positions de Himilce et celle de la famille Barca.

Le rythme est donc lent, il y a assez peu de dynamisme mais cela n’entache en rien la lecture une fois qu’on est prévenu. On prend le temps de s’attarder sur les pensées, sur les sentiments et sur une ambiance toute particulière que j’ai beaucoup appréciés. On prend également le temps de découvrir la tristement célèbre cité de Carthage, avec parfois son propre langage et ses coutumes. J’aurais aimé avoir un peu plus de détails la concernant mais l’axe de ce roman ne le permet pas. Cela aurait donné lieu à des digressions non pertinentes alors on se satisfait tout à fait de suivre Himilce à travers les rues et les temples de la cité.

Pour conclure, ce fut une étonnante et très agréable lecture, surtout pour une passionnée de l’Antiquité telle que moi. Je me suis éprise de Himilce et de son désir d’indépendance et de liberté et j’espère que vous lui donnerez l’opportunité de conquérir votre cœur également.

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