L’Odyssée de Pénélope, Margaret Atwood

Depuis toujours nous étions tous deux des menteurs émérites et éhontés.

« Depuis toujours nous étions tous deux, de notre propre aveu, des menteurs émérites et éhontés.  » Ainsi Pénélope évoque-t-elle le couple qu’elle formait avec Ulysse – Pénélope qui, comme son époux, recourut à la ruse et à l’artifice pour sauver sa vie.
Selon Homère, Ulysse à son retour de Troie massacra tous les prétendants à son trône qui, en son absence, avaient courtisé son épouse. Mais il fit aussi pendre les douze servantes de Pénélope qu’il accusa de l’avoir trahi. Dans cette relecture originale du mythe grec que nous propose Margaret Atwood, Pénélope, hantée par la mort de ses servantes, raconte depuis les Enfers sa propre version de l’histoire, celle d’une femme, d’une épouse, d’une mère et surtout d’une reine bien plus lucide et plus forte que ce que les hommes ont voulu croire jusqu’à aujourd’hui.


Pénélope était décidemment à l’honneur dans mon challenge Nerdae Antiquae cette année. C’est généralement une figure de l’Antiquité que je respecte pour son intelligence et son incontestable patience (sérieusement, comment elle a fait pour non seulement supporter l’égo d’Ulysse mais aussi l’attendre durant vingt ans ? Elle méritait tellement mieux !). Néanmoins, la plupart des réécritures que j’ai lu ne m’ont pas convaincu. Hormis celle-ci.

Récit court, percutant, qui reprend parfois le format d’une tragédie grecque antique avec des parties de chœur chantées, l’Odyssée de Pénélope a un défaut : la traduction de son titre. Il fallait que je le mentionne, j’en suis désolée par avance mais, sérieusement ? L’Odyssée de Pénélope à la place de la Pénélopiade ? Il faut savoir qu’en grec, Ulysse se traduit par Odysseus. Donc l’Odyssée est littéralement le récit d’Ulysse. L’autrice a choisi de nommer son récit, la Pénélopiade, pour copier l’idée de Homère, à savoir, le récit de Pénélope. Alors pourquoi la traduction française ajoute le mot « odyssée » ? Je ne sais pas et cela m’a beaucoup contrarié. Et je voulais donc que vous le sachiez.

On en revient donc aux bons points de ce livre. J’ai généralement, et vous le savez, un peu de mal avec un style d’écriture moderne pour un récit sur l’antiquité. Eh bien sachez qu’ici, je l’ai beaucoup apprécié. Un certain mélange est fait, plein de sarcasme et d’ironie qui dessine une Pénélope attachante et pleine de ressources. Son intelligence subtile et sa perspicacité sont mises en valeur.

Nous avons donc affaire à l’envers du décor, l’attente et la gestion d’un domaine abandonné par son roi. Rien de bien excitant dit comme cela, mais si l’on regarde d’un peu plus près, nous avons le droit à un récit captivant de politique intérieur et de diplomatie.

La place donnée au chœur des servantes, exécutées par Ulysse et son fils, propose une vision et une réflexion intéressante de la place des femmes dans cette société et souligne le sexisme présent dans l’Antiquité mais aussi de nos jours, à nous concentrer sur les exploits d’Ulysse et passant sous silence ses défauts.

Je vous recommande donc ce court récit qui s’avère bien plus intéressant qu’il n’y paraît !

Les Héroïdes, Ovide

Les tâches que tu y verra, ce sont mes larmes qui les ont faites; mais les larmes ont tout le poids de la parole.

Des héroïnes souffrent de l’absence de l’homme qu’elles aiment et qui, le plus souvent, les a perfidement abandonnées. Comment peuvent-elles lui dire leurs souffrances? En inventant, pour répondre à cette question, le genre de la lettre amoureuse, à la fois monologue tragique et cantate lyrique, Ovide explore le vertige des héroïnes blessées. Les accents des Lettres d’Amour résonnent encore dans les aveux de Phèdre comme dans ceux de la religieuse portugaise ou dans les chants désespérés des divas d’opéra.


Grande passionnée par les femmes de l’Antiquité et de la mythologie, je ne pouvais passer à côté de cette œuvre classique. Cela fait quelques années qu’elle traîne dans ma bibliothèque, attendant patiemment que je me lance. Et j’ai finalement trouver l’occasion parfaite : le challenge Nerdae Antiquae.

Par où commencer pour vous vendre cette pépite ? La notoriété de l’œuvre ? Ses personnages ? Son format ? Son auteur ? Difficile de choisir. Commençons peut-être par le thème ! Ce livre est un recueil de lettres écrites sous forme de poésie, de femmes de l’antiquité à leur amant qui les a abandonnées. En d’autres termes : des femmes très énervées et tristes qui tapent sur leur amant qui s’est fait la malle. Tentant non ?

Passons maintenant rapidement sur la notoriété ! Œuvre classique disais-je, écrite par l’un des grands auteurs latins, que je remercie d’avoir mis à l’honneur des figures féminines. Féministe avant l’heure ? Peut-être. Sans doute. Ou simplement une volonté d’être original ? Possible aussi. Néanmoins, cela ne change pas le résultat, à savoir que l’on a une belle mise en avant de femmes importantes de la mythologie, trop souvent mises de côté ou mal représentée. Sa plume, du moins sa traduction, nous emporte avec poésie et parfois même de l’humour.

Toujours pas convaincu ? Voyons voir… Faisons un tour d’horizon des femmes présentes, voulez-vous ? Tout d’abord, la femme antique qui a capturé mon cœur : Médée. Médée qui maudit Jason pour son infidélité et son ingratitude. Vient ensuite Pénélope. Pénélope fatiguée de ne pas voir son mari revenir après tant d’années, la laissant aux prises avec des prétendants mal éduqués alors qu’il passe du bon temps avec toutes les femmes qu’il croise. Ariane ! Ariane qui hurle après Thésée pour l’avoir lâchement abandonné sur une île déserte alors même qu’il n’aurait pu réussir ses exploits sans elle. Ingrat aussi donc. Briséis qui reproche à Achille de ne pas l’avoir récupéré après s’être faite piqué par Agamemnon. Sappho, Hélène, Déjanire et bien d’autres encore.

Voilà donc tous mes arguments, sortis du cœur pour vous recommander cette incroyable œuvre antique. Donc n’hésitez pas du tout à vous laissez convaincre par mes propos et (re)découvrir cet auteur à travers ce recueil. Et si vous cherchez une occasion… Une deuxième édition du challenge Nerdae Antiquae peut-être parfaite pour vous !

Clap de fin pour le Nerdae Antiquae 2023 !

Quelques temps après le début du challenge que nous avons été très -trop- ambitieuses en terme de catégories… Trois catégories littéraires avec chacune quatre sous-parties, c’est trop dense.
Alors la prochaine fois, on tentera d’améliorer ce point pour que cela soit plus digeste et plus facilement réalisable.

En tout cas, nos neufs chroniques mensuelles ont été entièrement consacrées à l’Antiquité et ont été faites des fois littéralement une heure avant la deadline, ce qui n’a pas été de tout repos !

En plus des chroniques, nous avons pu vous proposer sur Instagram des stories-chroniques, ce qui nous a permis de valider quelques catégories de plus !

Le Nerdae Antiquae c’est également une Lecture Commune qui s’est déroulée sur Discord, et qui nous a permis d’avoir des échanges très intéressants avec vous ! Cette lecture nous a fait découvrir un auteur que nous ne connaissions pas mais que nous allons suivre dans le futur !

Et enfin, le challenge nous aura fait écrire deux « Thot » et demi, un format très chouette – en tout cas, nous on l’a trouvé très chouette.

On espère que ce petit mois 100% antique vous a plu ! On a beaucoup aimé le faire en tous les cas et vous faire (re)découvrir (on espère !) tout un tas de chouettes choses sur l’Antiquité et la littérature qui s’y rattache.

C’était une première pour nous, alors n’hésitez pas à nous dire commentaires ce que vous en avez pensé !

Antiquement vôtre,

Médée, Euripide, et aussi un peu de Rouquette et de Sénèque

Résumé éditeur

Comme à son habitude, Euripide a fortement innové quand il a composé en 431 avant notre ère sa Médée, la première tragédie de lui que nous ayons conservée. La Médée mythique était une magicienne aux pouvoirs redoutables, plusieurs fois criminelle. Ici, elle s’impose la catastrophe. Pour faire payer son infidélité à Jason, elle devient meurtrière de leurs enfants. Euripide a sans doute inventé ce crime. Elle ne se contente pas de se venger, mais anéantit le monde pour lequel son mari la quitte: elle désagrège la jeune rivale en même temps que son père, le roi de Corinthe, et, avec ses enfants, elle détruit le passé. Rien ne doit en rester, puisqu’il a été nié.
Dans cette tragédie, elle est le divin. Petite-fille du Soleil, elle s’était donnée librement à un mortel elle se reprend, mais dans un désastre qui la touche aussi. Euripide a choisi de ne pas mettre en scène la magie, mais la virtuosité avec laquelle l’étrangère parle les mots des Grecs, pour tuer. Contrairement à ce que disait Nietzsche, la dialectique ne dénature pas la tragédie, elle la renforce.

Célèbre sorcière, incantatrice de malheur, elle est surtout connue pour son infanticide… je vous parle évidemment de Médée !
Pour la catégorie « Classique » du Challenge, quoi de mieux que de lire la pièce d’Euripide ?

Le Chœur

A l’aide ! Terre et rayon du Soleil
lumière pure, daignez regarder, regardez
la femme maléfique, avant qu’elle ne frappe
les petits de sa main sanglante, tueuse de sa propre vie.
[…]
Ô lumière née de Zeus, retiens,
arrête, chasse de la maison cette femme dont les esprits bourreaux
ont fait une Erinye accablée et sanguinaire.
(Médée, Euripide, trad. Myrto Gondicas & Pierre Judet de la Combe, v.1251-1260)

Pour l’occasion, je me suis fait un petit cycle Médée, dans un ordre un peu chaotique : j’ai d’abord lu la version de Sénèque, puis une réécriture moderne de Max Rouquette avant de m’attaquer à la pièce d’Euripide. Petits sauts dans le temps dignes du Docteur !
En terme de personnages, la version du tragédien grec Euripide m’a le plus convaincue, mais c’est celle de Rouquette que j’ai préférée en terme de style. En revanche, la plus équilibrée à mon sens est la pièce de Sénèque.

L’intrigue, pour ces trois versions, est assez similaire : on se concentre toujours sur la fin du couple Jason-Médée, après que le héros grec ait répudié sa femme pour prendre pour épouse Créuse.
Ce sont les petits détails qui changent entre chaque tragédien mais qui mènent, inéluctablement, à la même finalité.
Médée est le personnage central de cette pièce, et c’est par elle que se déroule entièrement le fil dramatique. Euripide va beaucoup se concentrer sur l’opposition entre Jason et la sorcière, alors que Rouquette prend le parti pris de montrer l’attente, le désespoir du retour de Jason qui mène à la folie de Médée, quitte à avoir quelques longueurs.

Euripide à l’inverse va droit au but, et cela se ressent dans la caractérisation de ses personnages. Jason est un beau connard, qui ne voit ses enfants que comme des pions, des faire-valoir pour sa gloire. D’ailleurs, il ne se préoccupe que bien peu de leur sort, et les laisses bien volontiers à Médée lorsque celle-ci est exilée.
La magicienne elle ne tergiverse pas longtemps sur l’éthique, la piété ou quelque autre considération du genre lorsqu’il s’agit de se venger. Jason l’a dupée, l’a abandonnée, il va goûter à l’esprit retors, aux manigances cruelles de Médée. Chez Euripide, celle-ci ne demande pas un jour de plus à Créon pour voir ses enfants, non. Son jour, elle sait dès le début qu’il sera consacré à la perte de Jason, à la fin du règne de Créon.
L’ordre des morts est important, parce que tout mène au fait de rendre important aux yeux de Jason la mort de ses enfants. Il ne les aime pas, et Médée ne peux rien y faire ; en revanche, elle leur redonne la valeur d’héritier qui leur est dû, en rendant impossible tout autre enfant. Dès lors, elle peut tuer ses fils, et se venger parfaitement de son mari, qui se retrouve sur un trône brûlé qui n’est pas le sien, et sans héritier pour asseoir sa légitimité.
Créon est quant à lui intéressant dans cette version en ce qu’il comprend la dangerosité de Médée tout en la sous-estimant totalement.

J’ai trouvé très intéressant dans cette pièce le chœur et son positionnement clairement favorable à Médée. Jason est décrié, et le chœur des femmes soutiennent Médée jusqu’à ce qu’elle décide de tuer ses enfants. Seul ce crime rencontre leur virulente opposition. Médée est entourée de femmes qui comprennent sa position, qu’elle va même jusqu’à qualifier d’amies, et pourtant elle est résolument seule.
C’est un aspect que l’on retrouve que de manière édulcorée chez Sénèque et Rouquette : tous les personnages gravitant autour d’elle ne sont, d’une manière ou d’une autre, pas à son hauteur. Elle est seule oui, mais depuis le début.

Si Rouquette m’avait totalement convaincue avec son style très ampoulé (mais s’attachant définitivement trop sur un même thème) et sa réinterprétation des chœurs en psaumes à la limite de l’incantatoire, j’avoue que le côté très démonstratif d’Euripide m’a quelque fois sortie de ma lecture. Entendre les enfants décrire leur meurtre était plus hilarant que tragique une fois transposé en français…
Pour le coup, Sénèque est le plus équilibré sur le sujet : il va droit au but sans perdre le tragique nécessaire aux situations les plus extrêmes.

En définitive, cela a été pour moi une très bonne découverte, et j’ai vraiment aimé découvrir le personnage sous différentes plumes et interprétations !

L’Assassin Royal, Robin Hobb

Résumé éditeur :

Au royaume des Six-Duchés, le prince Chevalerie, de la famille régnante des Loinvoyant, renonce à devenir roi-servant le jour où il apprend l’existence de Fitz, son fils illégitime. Le bâtard grandit à Castelcerf, sous l’autorité de Burrich, le maître d’écurie. Mais le roi Subtil exige que Fitz reçoive une éducation princière. L’enfant découvre bientôt que le dessein du monarque est tout autre : faire de lui un assassin au service du pouvoir. Et tandis que les attaques des Pirates rouges mettent la contrée en péril, Fitz va constater à chaque instant que sa vie ne tient qu’à un fil : celui de sa lame.

Est-ce que Nawal a réussi à trouver le moyen de faire enfin lire l’Assassin Royal ? Oui.

Je cherchais un livre pour rentrer dans la catégorie « topos littéraire antique », et à peine ai-je eu le temps de le dire à la présidente du fan-club de Robin Hobb qu’elle m’exhortair de lire enfin, parce qu’il est temps quand même, le premier tome. Dans sa grande bonté d’âme, elle m’a prêté l’immense pavasse qu’est l’intégrale du premier cycle premier tome et m’a dit de m’arrêter là où elle avait balisé, pour que je puisse avoir le temps de lire le reste de ma PàL. Qu’il soit donc noté que, si je n’ai pas le temps de lire tout ce que j’avais prévu ça ne sera pas de sa faute. (Je dis ça parce que je suis à la ramasse).

Oui, parce que, comme elle me l’avait si bien dit, ce premier tome de Robin Hobb se lit effectivement très vite ! Si la plume de l’autrice est assez classique, elle arrive néanmoins à prendre un rythme ni trop lent ni trop rapide pour nous laissez le temps de découvrir son univers avec ses nombreuses régions, villes et personnalités.

J’ai trouvé par ailleurs très intéressant de suivre l’éducation du petit Fitz, de ses premières années à son adolescence. C’est précisément parce qu’il s’agit, même pour un héros d’épopée, d’une période relativement calme que l’on peut si bien apprendre à connaître le monde de Fitz, commencer à découvrir les trames politiques et militaires et se représenter l’échiquier de ce monde.

Les personnages que l’on rencontre au fil de ce premier tome sont tous extrêmement bien caractérisés et sont très humains. Combien de fois ai-je eu envie de secouer Burrich et de lui dire que Fitz avait besoin d’un câlin ! Comme tout aurait été bien plus facile dans leur relation à tout deux si Burrich et Fitz se rendaient compte que le vieux militaire voit le petit bâtard comme son fils, et que l’impétueux garçon voit le maître d’écurie comme son père !
Fitz est également très particulier et m’a laissé une drôle d’impression. C’est assez difficile à caractériser, probablement parce qu’il invoque exactement ce qu’Aristote recherche dans une tragédie : un personnage qui inspire la pitié et la terreur, de part sa proximité avec nous.
Autre personnage étrange s’il en est, c’est le Fou. Il est vraiment mon favori alors qu’on ne le voit qu’assez peu dans ce premier tome finalement. Figure très éthérée, il est une sorte de Pythie, d’esclave, d’ami, de confident. J’ai vraiment adoré sa caractérisation si particulière, et je trouve que Robin Hobb a véritablement réussi à retranscrire le côté volatile, hors du monde, de ce personnage.

L’intrigue qui se met en place, doucement mais sûrement, est très entraînante. Il y a à mon sens une bonne alternance entre des moments forts, complexes ou très mouvementés, et des moments plus calmes, qui permettent d’assimiler tout ce qu’on a pu lire jusque là. Ce qui me frappe particulièrement, c’est l’adresse avec laquelle l’autrice nous fait apprendre son univers.
Pour le dire clairement, je suis franchement une quiche avec les prénoms, les noms de villes, de royaumes et la géographie. J’adore les cartes mais je ne m’y reporte jamais, donc la plupart du temps les espaces sont plutôt… mouvants dans ma tête. Or là, Robin Hobb arrive vraiment à nous faire visualiser les différents lieux et leur connexion entre eux, ce qui est assez rare pour être souligné !

FitzChevalerie, un héros d’épopée

Comme nous l’avons abordé dans l’article précédent, on reconnaît certains topoi littéraires tirés de l’Antiquité dans l’Assassin Royal. Mais ce qui frappe le plus cependant, c’est la dimension épique qui se dégage de cette œuvre, principalement au travers de son personnage principal. Observons cela de plus près.

Commençons tout d’abord par le commencement : FitzChevalerie. Fils bâtard de l’héritier du trône, Chevalerie, il devient l’assassin du trône des Loinvoyant, sa famille paternelle. Le nom même de son père, qu’il porte aussi d’une certaine manière, annonce la nature héroïque du personnage. Les chevaliers sont en effet considérés comme des héros à l’époque médiévale et sont inspirés par les héros de l’Antiquité : la gloire militaire, le courage au combat primant sur tout le reste.

Sa qualité d’assassin en fait certes un anti-héros au premier abord mais Fitz coche les cases d’un héros : courageux, combattant capable de grands exploits, laissant une trace importante dans la mémoire et dans l’Histoire de son pays. On remarque également que c’est un homme de lignée royale. Certes, bâtard, mais il partage le sang des rois et reines des Six-Duchés, ce qui le rapproche d’Ulysse, roi d’Ithaque, Ménélas, roi de Sparte ou encore de Hector, prince de Troie et d’Achille, prince de Phthie.

Il est intéressant de noter également le fait que l’arme de prédilection de Fitz est la hache, lui permettant une force brutale qui n’est pas sans rappeler celle d’Héraclès. D’ailleurs, Fitz est parfois pris d’une transe violente lors des batailles, qui rappelle encore une fois la folie meurtrière d’Héraclès.

Fitz est donc un grand combattant, sur qui des chansons ont été écrites, que cela soit sur ses exploits guerriers ou encore sur sa folie vengeresse à la fin de la première époque (je n’en dis pas plus, spoiler !). Des histoires (sous forme de chants d’ailleurs !) ont été racontées à son propos, telles les légendes sur les héros antiques, mêlant réalité et mythe, qui lui confère un statut de héros à la fois craint et admiré. Cette ambiguïté chez Fitz le rapproche une fois encore des héros tels qu’Achille ou Héraclès, qui sont à la fois admirés pour leur valeur au combat mais aussi craint pour la violence dont ils sont capables.

Fitz suit également sa quête afin de sauver (et plus d’une fois !) son royaume. Il passe d’obstacles en obstacles, de blessures en blessures, passant même par la mort pour en revenir. Là encore, on peut y voir une sorte de catabase (cf. l’article sur les topoi littéraires !) un peu réarrangé mais tout de même intéressant à lier. Tel Ulysse qui tente tant bien que mal de retourner chez lui, Fitz se voit contraint de quitter sa maison pour répondre à l’appel de son destin. Destin que l’on suit durant plusieurs décennies, telle l’épopée d’Ulysse.

En tout ces points, on retrouve donc chez ce personnage toutes les qualités (et parfois les défauts…) d’un héros de l’Antiquité, qui confère à cette histoire une dimension épique digne des histoires d’Homère.

Sélection pédagogique – Les Parques : Nona

Pour valider la catégorie Parques : Nona, j’ai voulu faire une sélection de documentaires sur la mythologie, documentaires qui se déclineraient pour toutes les tranches d’âge. Pour ce post, vous n’aurez donc pas un, non pas deux, mais trois livres qui vous seront présentés !


Nous commençons cette valse avec La Mythologie, l’essentiel tout simplement, titre rudement sobre mais terriblement ambitieux s’il en est.

Résumé éditeur :

Un ouvrage qui expose simplement et grâce à de nombreux schémas, les grands mythes et personnages du monde entier. Un livre synthétique et accessible au plus grand nombre.
Pourquoi Apollon consulta-t-il l’oracle de Delphes ? Qu’est-ce qui opposa Thor à Loki ? Comment les Égyptiens de l’Antiquité concevaient-ils la mort ?
Découvrez les réponses dans ce livre de référence qui explore plus de 80 mythes provenant des quatre coins du monde.

De fait, Mythologie, l’essentiel tout simplement réussit totalement son paris, puisqu’il représente une sorte de recueil exhaustif de caractéristiques, faits, histoires, etc. concernant chaque mythe qu’il aborde. J’ai beaucoup apprécié le fait que les auteurs et autrices ne s’attachent pas qu’à la mythologie gréco-romaine, et qu’ils présentent des récits du monde entier. Le livre est très fourni, très dense, et saura plaire aux plus grands amateurs du genre, et ce, dès 12 ans, pour son aspect extrêmement rigoureux, presque proche d’un dictionnaire de mythologie !


Continuons avec un titre qui cette fois-ci est accessible, dès 7 ans, et qui m’a particulièrement tapé dans l’œil avec son titre extrêmement accrocheur, et, il faut le dire, prometteur : Un dieu sur deux est une déesse, de Christiane Lavaquerie-Klein, Laurence Paix-Rusterholtz et Clémence Pollet.

Résumé éditeur :

La mythologie qu’on a trop longtemps oublié de raconter aux enfants…
Qui se cache derrière les grands dieux de la mythologie bien connus de tous?
Une multitude de déesses plus fascinantes les unes que les autres !
Guerrières, protectrices, savantes ou amoureuses, elles sont libres, rusées, puissantes et vivent des aventures palpitantes. Leurs exploits et leurs pouvoirs n’ont rien à envier à ceux des dieux.
Cette anthologie nous mène à la rencontre de 25 déesses… certaines ont été oubliées, d’autres sont encore aujourd’hui vénérées.

Franchement, je suis totalement fan du titre, qui veut résolument redonner aux divinités féminines la place qui leur est due. Le livre se présente dans une forme un peu hybride, avec en première partie un récit et en deuxième partie une fiche d’identité de la déesse présentée.
Le passage romancé reprend une scène emblématique de la tradition autour de la déesse, ce qui nous plonge directement au cœur de l’action ! La double page suivante permet ensuite d’en apprendre plus sur la déesse, ses attributs, sa fonction, sa filiation, etc.
J’ai vraiment trouvé cette double fonction du livre très pédagogique et adaptés aux plus jeunes à partir de 7 ans, qu’ils découvrent pour la première fois la notion de mythologie ou, au contraire, qu’ils approfondissent leur connaissance en explorant d’autres univers mythiques ou d’autres personnages, moins connus. Un livre pour toutes et tous !


Enfin, terminons cette danse avec un gigantesque album, qui m’a fait pousser un cri de joie en le voyant : Mon grand tour du monde des monstres et des créatures mythologiques de Laure du Faÿ.

Résumé éditeur :

De la Grèce et l’Égypte antique aux imaginaires sud-américain et nordique, en passant par l’Asie : le jeune lecteur apprivoise tous les monstres et apprend à les identifier et les nommer dans les histoires qui les mettent en scène.
Un tour du monde conçu comme une porte d’entrée grande ouverte sur l’imaginaire. La dimension esthétique et spectaculaire joue sur le plaisir de découvrir les personnages communs à de nombreuses histoires et celui de se faire un peu peur.

J’avoue très honnêtement avoir une légère passion pour les albums, et encore plus quand ils sont à thématique antique. Quand j’ai vu celui là, j’ai immédiatement craqué, pour la simple et bonne raison qu’il est adorable. Et sur la mythologie.

Il se concentre sur quelques créatures emblématiques des folklores du monde, pour les faire connaître et reconnaître des enfants (et des adultes !) à partir de 18 mois. Les planches sont très jolies, très colorées, et surtout bien rigides pour résister aux petits monstres qui les manipulent, et je l’ai vraiment trouvé très intelligemment fait ! Et en plus, il est super grand, c’est ultra cool.
Chaque double page s’arrête sur une mythologie ou un folklore différent, ce qui permet de découvrir tout un tas de culture à travers le globe ! Incroyable, vraiment.


Cette sélection s’arrête ici, mais j’espère que ce petit tour d’horizons vous aura plu ! J’ai beaucoup aimé constater que les éditeurs s’intéressaient de plus en plus aux mythologies de tout le globe, et non plus seulement aux mythes gréco-romains. Les légendes et mythes sont vraiment, à mon sens, un terrain très fertile pour ouvrir les enfants, mais pas que, aux différentes cultures, et c’est un vrai plaisir que de retrouver de tels ouvrage sur les étagères des librairies !

Cosmogony of the Bound – Jessica Lamont

Pour Decima – Non Fiction, quoi de mieux que relire un article de Jessica L. Lamont ?Ce nom ne vous dit rien ? Rien de plus normal : il ne s’agit pas d’une autrice mais d’une chercheuse spécialisée en épigraphie antique magique. Ses recherches se concentrent donc sur les inscriptions magiques qui utilisent comme support écrit des matériaux non périssables (pierre, métal, bois, etc.) et plus précisément sur les inscriptions magiques grecques.

Les sociétés grecques étaient très différentes de notre société occidentale, très rationalisée : pour les Grecs, la magie est une possibilité tout à fait légitime pour résoudre un problème. De fait, nombre de cités-états la bannissait et faisaient des lois contre son utilisation : certains procès avaient comme arme du crime un sortilège (je ne saurai trop vous recommander à ce propos l’Apologie d’Apulée, où se dernier se défend d’avoir ensorcelé une veuve pour lui soutirer son argent).
Bien qu’interdite, nombre de Grecs, de toute classe sociale et de tout horizon géographique, y avaient recours pour se débarrasser d’un rival encombrant, réduire au silence la ou les personnes qui vous traînent en justice depuis 10 ans, ou simplement maudire son commerçant de proximité (souvent rival encombrant).
Ces petits mots doux sont appelés katadesmoi parce que, si la plupart ne comprennent que le nom de la personne maudite, une grande partie utilise des formules magiques dont le verbe principal est καταδέω (katadéō) « j’entrave ».

Très sympa comme fun fact me direz-vous, mais enfin quel rapport avec la mythologie ?

C’est justement tout le but de l’article de Jessica Lamont, sobrement intitulé Cosmogony of the Bound (La Cosmogonie des Enchaînés), que de démontrer le lien entre figures mythologiques enchaînées et tablettes de malédiction.
Un Enchaîné, nom très classe s’il en est, correspond à une figure mythologique qui, après avoir renversé l’ordre établi, se fait punir… et donc enchaîner. C’est par exemple le cas de Prométhée, qui non content de voler le feu aux dieux pour le donner aux hommes, passe son temps à tromper son monde et donne à Zeus les pires morceaux de viande en offrande… ce que Zeus n’a que très très moyennement apprécié de la part d’un type qui porte la même épithète (sorte de surnom classe) que son père se fiche de lui (il a de sérieux Daddy issues). Prométhée se fait donc enchaîner et est destiné à se faire déchirer les chaires chaque jour par un vautour qui cherche à lui dévorer le foie. Vaste programme donc.
En général, les Enchaînés se retrouvent dans le Tartare, lieu le plus profond et sombre des Enfers, où se trouvent les prisonniers des pires peines. C’est dans cet endroit que les Hécatonchires, des géants à cent bras (d’où leur nom, avec hekaton – centaine et chires – main), se sont souvent retrouvés entravés et qu’ils ont souvent été libérés (puis de nouveau enfermés) pour renverser les souverains de l’univers.

Dans tous les cas, une formule revient sans cesse dans la poésie archaïque, caractérisant les liens qui entravent ces personnages mythologiques, celle d’être « entravé par de puissantes entraves ». Chaque scène appuie sur la violence, la souffrance et le caractère indestructibles de ces liens… exactement ce qui est recherché lorsqu’une tablette de malédiction est produite.
Là est tout le propos de Jessica Lamont : dans les tablettes les plus archaïques (c’est-à-dire les plus anciennes) des traces de vers, comme en poésie, sont visibles.
C’est, pour cette chercheuse, une indication que les tablettes de malédiction, loin d’être une magie purement écrite, sont les seules traces d’une très vieille tradition orale de malédiction, qui étaient, à l’instar des épopées, chantés et versifiées.

Or, pourquoi donc s’intéresser à des créatures mythologiques enchaînées lorsqu’on maudit quelqu’un ?

Tout repose sur la notion du similia similibus. Phénomène clef en malédictions gréco-romaines, il est ce qui permet à la magie d’opérer : en donnant un modèle, on demande à ce que l’univers reproduise sur la victime une action similaire. Puisqu’on veut empêcher la personne d’agir, de nuire d’avantage, on l’enchaîne avec les liens les plus puissants possibles. Quoi de plus puissants que ceux utilisés pour retenir prisonniers des dieux, des Titans et autres géants ? Et pour appuyer sur cette analogie faite entre les Enchaînés et la victime du sortilège, ce dernier va reprendre des termes qui rappellent les poèmes chantés, narrant ces emprisonnements mythologiques. Or rien n’égale la citation en terme de parallélismes, vous en conviendrez.
Et c’est exactement pour cela que dans les tablettes les plus archaïques, nous retrouvons la formule citée plus haut « être entravé de liens puissants » !

Tout cela est discuté dans l’article de Jessica Lamont à force d’exemples, de citations et d’explications tout à fait intéressantes. Très érudit, l’article pose néanmoins les bases pour ne perdre personne, ce qui m’avait beaucoup aidé au début de mon Master ! La chercheuse traduit également toutes ses citations en grec ancien, et donne la forme métrique des vers qu’elle met en évidence (c’est-à-dire qu’elle indique la musicalité, le rythme dudit vers).
Elle s’inscrit dans la continuité d’un grand ponte en magie ancienne grecque, et reprend sa théorie de tradition orale poétique, tout en y apportant des éléments novateurs.

C’est un article que j’avais vraiment beaucoup apprécié, même si l’anglais y est vraiment très soutenu.

uit également toutes ses citations en grec ancien, et donne la forme métrique des vers qu’elle met en évidence (c’est-à-dire qu’elle indique la musicalité, le rythme dudit vers).
Elle s’inscrit dans la continuité d’un grand ponte en magie ancienne grecque, et reprend sa théorie de tradition orale poétique, tout en y apportant des éléments novateurs.
C’est un article que j’avais vraiment beaucoup apprécié, même si l’anglais y est vraiment très soutenu.

Frankenstein ou le Prométhée moderne, Mary Shelley

Par une nuit d’orage, Victor Frankenstein parvient à « animer la matière inerte » mais, horrifié par sa créature, il l’abandonne. Livré à lui-même, rejeté par tous, le monstre se révolte contre son créateur.
Entre fantastique et science-fiction, Mary Shelley peint un être aussi effrayant que touchant, qui aspire désespérément à se rapprocher des hommes…


J’ai fais d’une pierre deux coups pour ce roman : c’est tout d’abord une lecture de travail car c’est une œuvre que j’ai choisi d’étudier cette année avec ma classe de 4e en français, et c’est une œuvre parfaite pour la catégorie « Cangjie : Univers antique dans le contemporain » du challenge Nerdae Antiquae. Univers peut vous semblez un peu exagéré mais sachez qu’il y a beaucoup de références mythologiques et antiques dans ce roman. Mais nous en reparlons un peu plus tard.

First thing first : j’ai passé un bon moment de relecture. J’avais déjà très apprécié ma lecture il y a quelques années et c’est toujours le cas aujourd’hui. J’ai éprouvé beaucoup de compassion pour la Créature, qui souffre de la différence et du rejet que cela lui cause. En revanche, Victor Frankenstein m’a exaspéré au plus haut point ! Je n’avais pas souvenir qu’il était si arrogant et égocentrique, bouffi d’orgueil. Il ne cesse de se lamenter du sort qui s’acharne sur lui alors même qu’il est le seul responsable de ce qui lui arrive. Il blâme la Créature qu’il a créée et qui n’a rien demandé. Je n’ai donc pas su m’attacher à ce personnage, contrairement à la Créature, qui, malgré ses crimes, a su m’émouvoir.

La question de qui est le véritable monstre dans cette histoire se pose alors. Une question de moral, d’éthique, qui traverse tout le roman. J’ai beaucoup aimé ce questionnement qui ne trouve finalement pas réellement de réponse et qui laisse le lecteur à sa réflexion personnelle. La plume de l’autrice met en exergue cette dimension rétrospective qui pousse le lecteur à se poser des questions.

Et bien évidement… la dimension antique ! Le titre l’annonce dès le début, ce personnage qu’est Frankenstein s’inspire de la figure mythique de Prométhée, dans son intelligence et le fait de défier le pouvoir divin. En effet, Prométhée vole le feu aux divinités pour favoriser les humains ; Victor Frankenstein crée la vie de manière scientifique, s’arrogeant un pouvoir réservé aux divinités. Mais ce n’est pas la seule référence antique. On peut également y retrouver une réécriture du mythe de Pygmalion et Galatée : Pygmalion, un sculpteur, tombant amoureux de la statue qu’il crée et qui prend vie, là où Frankenstein est pris d’horreur devant sa propre création.
Mais au delà des mythes, Mary Shelley n’hésite pas à montrer son éducation classique en attribuant à Frankenstein des traits typiques des hommes antiques : la réaction de Frankenstein face à la mort de ses proches est typique des héros mythologiques et médiévaux. On retrouve le désespoir, les larmes et l’évanouissement qui sont marqueurs du chagrin des héros et des chevaliers. La référence aux Furies est également évidente sur la fin.

Tout cela pour dire que oui, Mary Shelley n’hésite pas à s’emparer des motifs et des codes de l’Antiquité pour les mêler avec brio à une dimension contemporaine scientifique et nous offrir un questionnement intemporel, qui fait de Frankenstein ou le Prométhée moderne un classique et un fondateur d’un tout nouveau genre à n’en pas douter.

Aríadnê, Flora Boukri

Résumé éditeur :

Maintes fois, on a raconté que, jeune et naïve, j’offris mon aide au valeureux Theseus contre sa promesse de m’épouser, avant d’être lâchement abandonnée par mon héros. Ceux-la veulent me réduire, moi, Ariádnê, a un simple pion dans le grand échiquier des dieux de l’Olympe. Mais que savent-ils de ce qu’il s’est réellement passé ? Je vais vous confier comment, première fille du roi de Crète, j’ai vu deux frères partir pour la Grèce et un seul revenir, détruit et humilié. Comment mon père Minos, fou de rage, s’est transformé en tyran, exigeant que son ennemi le roi de Grèce le dédommage de la pire manière. Comment, dans les profondeurs d’un labyrinthe monumental, a été enfermée une créature contre-nature, mi-homme, mi-bête, condamnée à une existence de prisonnière. Et comment, nous, Ariádnê, Phaidra, Pasiphaé, les figures de l’ombre, nous avons joué notre rôle… ou choisi notre propre destinée.

Les couvertures de cette collection nous ont tout de suite beaucoup attirées avec Nawal, le sujet aussi, si bien qu’on a chacune acheté un livre de l’autrice ! J’ai préféré prendre la réinterprétation du mythe d’Ariane ; c’est un récit que j’affectionne beaucoup, aussi étais-je ravie d’avoir le point de vue de la jeune fille et d’observer comment l’autrice allait réinterpréter cet univers !

C’est donc pour la catégorie Cangjie – Création d’univers/de Lore, que j’ai lu ce titre !

Quelle n’a pas été ma surprise de découvrir que le roman était en fait constitué de chants, comme les épopées antiques ! Chaque chant porte la voix d’un personnage, qui parle alors à la première personne. Si j’ai trouvé la division entre ces chants et points de vue bien amenée et cohérente avec l’intrigue, je regrette en revanche que le style ne change pas en fonction du personnage servant de focus.

Flora Boukri a fait un énorme travail de recherche culturel et cultuel, et cela se ressent ! J’ai beaucoup apprécié retrouver des termes techniques, toujours expliqués dans le lexique de fin, cela donne un côté très pédagogique à l’ouvrage !

Le travail de mise en perspective est également très intéressant : Aríadnê est minoenne, elle n’appartient donc pas à la même culture que Théseus. D’emblée, ses rites et croyances nous sont décrites et montrées avec révérence, respect. Cependant, dès qu’elles sont observées à travers les yeux du héros grec, elles deviennent barbares, impies, révoltantes. C’est un aspect que j’ai trouvé très intéressant dans ce roman, et qui montre toute la richesse de la Grèce antique, même dans son aspect totalement mythique.

L’autrice, si elle revisite totalement le mythe d’origine, le fait avec brio, et réussit à lui donner une impulsion féminine et féministe très bien rôdée. Il y a eu une réelle réflexion sur le personnage d’Ariane, sur ce qu’impliquait de fournir une sortie à un Grec, d’espérer donc que son demi-frère meurt, de tout quitter. Toute cette réflexion se retrouve par ailleurs expliquée dans une note de fin, ce qui est très original et très apprécié !

Toute l’intrigue a été réfléchie, fait sens, se tient et se soutient : l’intervention des divers protagonistes est tout à fait pertinente dans le déroulé de l’histoire, et permet même d’amener doucement la fin, sans pour autant la dévoiler.

Ainsi, même si le style un peu trop descriptif de l’autrice ne m’a pas tellement convaincue, l’intrigue, le travail de recherche et la réinterprétation du mythe si originales et bien pensées ont su définitivement me faire apprécier ma lecture, au point de la dévorer !